Poulsen, Lundin, Dąbrowski

Une corde supplémentaire à l’arc pourtant déjà bien fourni de Hasse Poulsen (que l’on peut retrouver aussi en action sur le nouveau disque de Das Kapital). Ainsi pourrait-on qualifier sommairement ce disque en trio dont les musiciens présentent de fortes attaches avec le Danemark (pays dont deux d’entre eux sont natifs et que le troisième connaît fort bien pour y avoir étudié).

Rappelons au passage que le guitariste a déjà eu l’occasion de côtoyer son compatriote Fredrik Lundin depuis plusieurs décennies et que le saxophoniste joué dans différentes formations avec le trompettiste polonais Tomasz Dąbrowski, le troisième homme de l’histoire. Les fondations de l’édifice sont donc très solides. Unknown Winter, qui paraît sur le toujours juste label BMC Records, se présente comme une collection de pièces plutôt courtes marquées par une volonté de concision dans la liberté – les 14 compositions étant signées Hasse Poulsen – qui sont chacune le prétexte à des déambulations fraternelles entre ces « gens du Nord » n’ayant pas leur pareil pour instaurer une succession de climats variés. La diversité de ces derniers n’est jamais synonyme d’éparpillement : ces « songs » paraissent puiser à la même source essentielle, celle d’une mélodie toujours en embuscade, qu’il n’est toutefois jamais interdit de bousculer par une embardée improvisée.
On entendra aussi bien un blues qu’un thème aux accents nostalgiques, proche d’un chant traditionnel (« Shadow, My Sweet Nurse », « Let The Bells Ring », « Holy Room »), une évocation animalière aux sonorités presque urticantes (« Wasp And Butterfly ») ou une conversation très animée entre les trois instruments (« Dark Moon »). On passe ainsi de paysage en paysage comme au cœur d’instantanés pris sur le vif, entre phases contemplatives (« Any Bright Eye », « Unknown Winter ») et appels vibrants lancés à la face d’un monde sans âge (« Natives », « Complaint In Southern Sweden »). Formation par nature équilatérale, le trio offre à chacun de ses protagonistes un espace d’expression suffisamment ouvert du fait de ses inspirations multiples, pour que la musique puisse respirer et ne jamais se laisser contenir dans une forme préétablie et durable.

Intemporel et onirique, tel est bien cet Unknown Winter qui n’appartient qu’à lui-même et vient nous rappeler à quel point l’univers de Hasse Poulsen est aussi riche qu’inclassable. En attendant ses nouvelles aventures…