

Hayoung Lyou
The Myth of Katabasis
Hayoung Lyou (p), Thomas Morgan (b), Steven Crammer (d).
Label / Distribution : Endectomorph Music
L’exaltation, voilà le sentiment qui nous envahit lorsque les premières notes surgissent de ce disque. Nous sommes face à une découverte quasiment inespérée alors qu’on pensait que la formule piano, contrebasse, batterie avait presque tout exploré. Chaque décennie fait honneur à des trios devenus depuis historiques. Thelonious Monk, Ahmad Jamal, Bill Evans, Martial Solal, Paul Bley, Chick Corea, Keith Jarrett, Joachim Kühn, Marilyn Crispell ont fait avancer la musique à grands pas.
Hayoung Lyou a tout en elle pour prolonger cette lignée prestigieuse ; elle bénéficie d’une technique parfaite qui la voit s’engager avec aisance dans un jeu pianistique nuancé. Il suffit de se plonger dans les trois variations qu’elle approfondit en solo. « Descent I » se développe avec parcimonie, la clarté avec laquelle la trame rythmique s’installe avec la main gauche contraste habilement avec le discours chantant d’une main droite virtuose. La place dévolue aux respirations successives dans « Descent II » amplifie les attaques franches déployées sur le clavier, des questionnements se succèdent. La générosité qui déferle dans cette musique atteint son but dans « Descent III », la précision se conjuguant alors avec les accélérations qui aboutissent à une superbe floraison de coloris.
La structure de l’album traite de la catabase, la descente aux enfers du héros qui se mesure à des épreuves initiatiques et formatrices. La contrebasse de Thomas Morgan et la batterie de Steven Crammer font brillamment rejaillir une variété rythmique qui permet à la pianiste de ciseler des harmonies. « Ascension » possède une dimension dramatique et contribue à prolonger l’improvisation dans un moment de grâce. Les trouvailles sur le clavier s’accomplissent avec un toucher raffiné, constamment en équilibre entre une pensée féconde et une fervente liberté d’action. La fraicheur dispensée dans le romantisme d’« Ombre » révèle un considérable plaisir du jeu, le piano résonne de multiples déflagrations sonores, toutes marquées par la vivacité.
Née en Corée du Sud et actuellement installée à Brooklyn, Hayoung Lyou a commencé sa formation au piano à l’âge de cinq ans et son labeur incessant aboutit à un discours profondément original. Les inflexions de son phrasé ainsi que son imagination font de The Myth Of Katabasis une œuvre qui déborde d’intensité émotionnelle. Photographiée par Eleanor Petry, la pianiste pose avec un regard franc qui laisse augurer un avenir radieux.