James Mainwaring, Dave Kane, Emil Karlsen

Un Irlandais du Nord, un Britannique, un Norvégien et une passion commune pour l’improvisation, il n’en faut pas plus pour que ces musiciens s’engagent dans des chemins non balisés. Deux éléments les distinguent, l’exquise lisibilité des thèmes développés et l’énergie farouche avec laquelle ils répandent leur musique.

Le nom du groupe s’inspire d’une toile de Jean-Michel Basquiat qui représente Exu, figure mythologique de la tradition du vaudou haïtien souvent associée au diable par les églises chrétiennes. Semblables à cette œuvre picturale complexe du peintre américain, les compositions se révèlent intenses et jalonnées par des brisures de tempo. « That’ll Do It ! » - Ça fera l’affaire ! Voilà un titre explicite, les trois instrumentistes vont droit au but sans jamais manifester de complaisance. Le jeu collectif n’est en rien alambiqué, c’est une intensité frénétique qui se déverse dans des pièces très courtes et efficaces. « Berne It Up (for Tim Berne) », hommage au saxophoniste d’avant-garde, invite à explorer les carcans mélodiques d’un musicien qui a laissé une empreinte indélébile dans la musique improvisée.

Le saxophoniste James Mainwaring avait marqué les esprits avec son groupe Tipping Point qui le voyait s’exprimer avec le pianiste Matthew Bourne, également présent avec Dane Kane dans son album The Eye Of The Duck. Ce contrebassiste familier du jazz britannique libertaire aux côtés d’Evan Parker, Keith Tippett, Paul Dunmall ou Elton Dean déploie des lignes rythmiques habitées par une plasticité très efficace comme dans « Versus Medici ». L’orientalisme sous-jacent exprimé par le saxophone soprano dans « The Field Next To The Road » est rehaussé par l’ensorcellement qu’installe malicieusement le batteur Gard Nilssen, transfuge de Bushman’s Revenge.

Partagé entre la tradition et l’innovation The Exu se doit d’être écouté attentivement afin d’en déceler les subtilités. Le trio privilégie la tension narrative et crée une musique sans cesse stimulante.