Chronique

Joëlle Léandre

At Souillac en Jazz – Live in Calès’s Church

Joëlle Léandre (cb, voc)

Label / Distribution : Ayler Records/Orkhestra

Depuis bon nombre d’années, le festival Souillac en Jazz a essaimé au-delà de sa seule commune éponyme. C’est ainsi que Calès, à une dizaine de kilomètres de Souillac, a accueilli en juillet 2021 un concert solo de Joëlle Léandre. Un événement, soit dit en passant, puisque la contrebassiste, figure de proue de la musique improvisée, est une musicienne majeure ; l’équipe du festival, sous la houlette de Robert Peyrillou, ne s’y est pas trompée, s’associant au label Ayler Records pour l’enregistrement et la publication de ce live.

Rien pourtant n’avait été prévu à l’avance et c’est un très heureux concours de circonstance qui a tout déclenché. A l’origine, il y a Christian Pouget, réalisateur d’Affamées, film où il mettait en lumière Joëlle Léandre, et le souhait de ces deux de capter une série de concerts solo de Léandre dans des églises. Pouget a donc filmé le concert et la captation son a trouvé grâce aux yeux de Léandre pour devenir un CD.

Bien sûr, il ne s’agit pas d’une musique consensuelle. Léandre y mène sa barque sous les auspices de l’improvisation la plus totale, sans aucun filet de sécurité. Comme à son habitude, pourrait-on dire, et les aficionados y trouveront leur bonheur. On n’y trouve aucun sucre ajouté mais la photographie sonore d’instants qui se suivent. Y trouverez-vous la colère, la douceur, l’énergie, la frénésie, la rudesse, la suavité ? C’est en tout cas avec ces émotions qu’elle exacerbe, qu’on s’emplira de ce solo de contrebasse. Chacune des pistes est une succession d’expressions tantôt douces, tantôt graves, de notes sur le fil – écoutez donc tout particulièrement « Calès II » –, d’équilibres, de crescendos et de decrescendos, de souffles qu’on retient ou pas.

Les deux dernières pistes, regroupées en un « Private after-set », ont été enregistrées le lendemain matin du concert. Elles ne trouvent pas de conclusion avec les applaudissements du public. Mais prêtez-leur la même attention que si vous étiez dans la salle : elles emplissent d’intensité celui qui prend la peine d’aller y chercher profondeur et volume.

par Gilles Gaujarengues // Publié le 6 mars 2022
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