Chronique

Kjetil Mulelid

Agoja

Kjetil Mulelid (p, Wurlitzer, Rhodes, synth), Andreas Winther (dm), Bárður Reinert Poulsen (b), Signe Emmeluth (as), Trygve Seim (as), Martin Myhre Olsen (ts), Sasha Berliner (vib), Selma French (vln), Lyder Røed (tp), Mathias Eick (tp), Arve Henriksen (tp), Lars Horntveth (pedal steel guitar).

Label / Distribution : Odin Records

Il faut prendre le temps d’écouter toutes les subtilités qui ont inspiré Kjetil Mulelid dans sa dernière œuvre discographique, Agoja. Réalisé pour une formation élargie, cet album consacre le talent d’un compositeur jusqu’ici réputé pour son jeu pianistique. Le disque What You Thought Was Home, qu’il avait réalisé en 2019 avec Bjørn Marius Hegge et Andreas Skår Winther, a profondément marqué l’évolution du trio jazz, recueillant des éloges planétaires.

Père pour la première fois, Kjetil Mulelid a nommé son dernier album Agoja en référence au premier mot, forcément imprécis, qu’a prononcé son fils. Les musicien·ne·s qu’il a réuni·e·s installent des coloris transitoires durant l’évolution de la thématique. L’ostinato de la fréquence basse qui ouvre le disque avec « Alone » fait immanquablement penser au battement d’un cœur, Arve Henriksen intervient avec ardeur à la trompette sur cette mélodie. Les distensions ne manquent pas, « Heroes » fait se succéder le piano et la contrebasse épatante de Bárður Reinert Poulsen jusqu’à l’arrivée de Martin Myhre Olsen, très inspiré au saxophone soprano.

Les deux voix singulières incarnées par Signe Emmeluth au saxophone alto et Trygve Seim au saxophone ténor approfondissent les caractéristiques du concept d’Agoja, leur unisson sur « A Prayer For Peace » sublime la délicatesse. L’éloquence du vibraphone de Sasha Berliner fait scintiller « Waiting Song », composition à l’esthétique suave. « Kingdom, Slowly Disappearing » clôt ce voyage par des palpitations sobres qui succèdent à une longue nappe sonore hypnotique.

Agoja nous a transportés dans des contrées lointaines. Sans jamais précipiter la succession des séquences musicales, Kjetil Mulelid a brillamment agencé la ferveur et le recueillement.

par Mario Borroni // Publié le 8 septembre 2024
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