Laure Donnat

Une maîtresse chanteuse provençale entourée de petits maîtres régionaux pour une session en studio égrenant des standards de façon plus que convaincante (on peut les croiser dans diverses instances pédagogiques jazz, comme l’Institut Musicale de Formation Professionnelle de Salon-de-Provence). La voix éthérée et puissante de Laure Donnat swingue et sculpte l’espace propice au déploiement d’accompagnateurs orchestraux.
Elle a bien quelque chose de « chabada » en elle, jusque dans des improvisations plus que parfaites, en particulier sur un « Afro-Blue » d’ouverture du disque qu’elle conduit sur les voies de l’émancipation des peuples (du jazz, mais pas que…) dont ce titre est un hymne. « Summertime » prend quand à lui des airs de manifeste : « Mama is here to protect you from the white man » déclame-t-elle en introduction ! Ce sens de l’échappée belle conjugué à un profond respect des racines doit être mis au compte de son parcours dans les musiques africaines dont elle est par ailleurs une experte.
Un piano romantique à souhait et une batterie survoltée forment un axe tout à fait pertinent dans l’ensemble des thèmes proposés, cependant que le contrebassiste (intense Lilian Bencini, arrangeur des éternels standards ici proposés) fait preuve d’un sens des nuances tout à fait à propos. Le quartette atteint une profondeur de l’âme et du corps sans effort. Ainsi, sur « Dat Dere », le « ça » du « moi » profond est bien atteint, restituant l’ineffable dimension instinctive du jazz.
Avec, évidemment, cette touche latine dont les sudistes gardent jalousement le secret, histoire de marquer leur territoire musical.