Malo Mazurié

Au nom de Louis, de Dizzy et de Bix… sans oublier Freddie (Hubbard) et même un peu Miles ! Se saisissant des idiomes jazz qui l’ont nourri, le jeune trompettiste Malo Mazurié se risque à une archéologie reconstitutive des univers musicaux qui fondent son jeu. Son propos est radical : il prend les choses à la racine, avec la complicité de musiciens qui savent embellir ses intentions artistiques, sans fioriture. C’est ainsi que le style jungle de l’orchestre d’Ellington prend un sérieux coup de lifting, lorgnant vers le groove contemporain - à moins que, comme le suggère malicieusement l’orchestre, ce dernier existât déjà il y a un siècle. Pratiquant l’art du remix instrumental par des modifications de métriques ou par des répartitions de phrases de thème entre les différents instruments, le jeune trompettiste balade ses inflexions entre délicatesse et rage de vivre, titillant parfois la justesse jusqu’à retrouver les accents vocaux d’une Billie Holiday, sans jamais se départir d’un son d’une rondeur exquise.

« The plunge » : c’est le diminutif de la sourdine plunger, qui ne s’insère pas et crée un effet « wah-wah » dont Mazurié maîtrise le moindre appui sur le pavillon de sa trompette. Le rejoignent dans son propos des compagnons de jeu avec qui il forme, notamment, l’orchestre de Cecil L. Recchia : le batteur David Grébil subvertit malicieusement les codes de la batterie swing en instillant des coups sur la cymbale crash, le pianiste Noé Huchard s’abandonne à un swing langoureux aux fulgurances bien senties, quand le contrebassiste Raphaël Dever fournit un soubassement soyeux et boisé à souhait à l’ensemble. Goûtez à ce disque : vous ne pourrez pas vous empêcher de le déguster encore et encore…