Chronique

Maluca Beleza

O Silêncio Imperfeito

Caroline Tolla (voc), Pierre Fénichel (b), Wim Welker (g, voc), Roman Gigoi-Gary (cl, bcl), Romain Morello (tb), Julien Heurtel (dm, perc, voc)

Label / Distribution : Label Durance / UVM Distribution

Brésil, ton univers imaginaire… En s’appropriant un répertoire venu de ce bout d’Amérique lusitanienne, Maluca Beleza rend justice à l’une des sources les prolifiques en matière de musique créole. Pas de bossa ici, à peine une samba (un titre du légendaire Ary Barroso, passé à la moulinette improvisatrice), mais plutôt des choros et des forrós, des formes éminemment populaires dans le pays-continent, qui servent de base à des compositions originales, lorgnant vers le rock (méchants solos de guitare de Wim Welker, ah comme ces cordes nylon fleurent bon la pop tropicale) ou même le dub (« Mysticis »). Toutes les compositions sont signées par Pierre Fénichel, décidément très présent dans la production phonographique récente - il recycle ici son « Doinel in the Sky », présent sur son album orienté reggae, en « Doinel no ceu », preuve s’il en est de la portée de ses propositions… Chez les soufflants, la clarinette évoque irrémédiablement l’univers brésilien, fût-elle basse, tandis que le trombone donne des saveurs bluesy et funky.

La chanteuse, Caroline Tolla, déploie une palette vocale riche en nuances, à même de restituer toute la saveur d’une langue lusitanienne tropicalisée dont elle maîtrise les intonations les plus chatoyantes. Après avoir passé plusieurs mois en Amazonie durant son enfance, elle n’a qu’une envie, y retourner en poésie et en musique. Saluons la présence des textes, d’une élégance certaine, dans le livret - qu’elle ne signe pas tous, certes, mais les siens n’ont pas à pâlir auprès de ceux de poètes confirmés. Même si elle a un parcours d’excellence dans le jazz (formation achevée au conservatoire de Marseille), elle n’a jamais perdu de vue les musiques traditionnelles de Méditerranée et reste à l’affût de rencontres riches en joutes improvisatrices avec des musiciens brésiliens de passage dans la cité phocéenne. Avec Maluca Beleza (« Douce folie »), elle s’affirme comme une passeuse incontournable de rêves d’enfance, qui prennent une saveur universelle par la grâce d’un maelstrom musical transcendant les frontières du Brésil, fût-il fantasmé.

On finit par être convaincu que, oui, la cité phocéenne peut avoir quelque chose de l’universel musical brésilien, et inversement !