Chronique

Maria Laura Baccarini/Régis Huby

Furrow

Regis Huby (vln), Maria Laura Baccarini (voc), Roland Pinsard (cl, bcl), Olivier Benoît (g), Guillaume Séguron (b), Eric Echampard (dm)

Maria Laura Baccarini est une chanteuse, danseuse et comédienne italienne notamment connue en France pour sa participation à Nuit Américaine, spectacle qui regroupait notamment, autour de Lambert Wilson, les musiciens Régis Huby, Guillaume Séguron ou encore Edouard Ferlet. Capiteuse, artiste en liberté, Maria Laura Baccarini a déjà participé à nombreux spectacles ayant en fond sonore Broadway, les compositeurs américains (Ives, Bernstein, Gershwin…) et le monde de la comédie musicale en général. C’est donc sans surprise qu’on la découvre sur Furrow, trois titres promotionnel, réinterprétant Cole Porter de manière très personnelle et non sans prendre des risques. Sur des arrangements très travaillés du violoniste Régis Huby, ici encore accompagné, pour cette revisitation électrique, par le guitariste Olivier Benoît, le batteur Eric Echampard, le clarinettiste Roland Pinsard - particulièrement remarqué - et le contrebassiste Guillaume Séguron, elle pose une voix capiteuse avec une acuité, une ironie et un charme sucré qui s’y prêtent admirablement. Une voix mise en valeur par l’arrangement dépouillé de « My Heart Belongs to Daddy », troublant tant on a l’habitude d’une certaine grandiloquence sur ces morceaux si célèbres ; cela n’en libère que davantage le charme entêtant, et c’est une corde sur laquelle elle n’hésite pas à jouer, dans la plus pure tradition du genre. Cette dichotomie apparente - d’un côté des musiciens plutôt tournés vers les musiques improvisées aux tensions électriques (les entrelacs harmoniques s’appuient sur une rythmique aux allures rock), et de l’autre le clinquant de Broadway, crée un décalage intéressant où la chanteuse trouve un réel espace de liberté, tout particulièrement sur « Love For Sale », très éloigné des versions de Julie London ou de Tony Bennet. Deux constats, donc : une chanson bien écrite peut tout se permettre ; et on attend avec impatience la suite de ce réjouissant projet.