Chronique

Matthew Herbert Big Band

Goodbye Swingtime

Label / Distribution : Accidental

Esthétiquement, l’objet est peu commun : c’est une sorte de livre, puisque le pourtour du CD est un pensum de conseils de lecture, alors que le livret détaille page à page, en ombre chinoise, un diorama représentant une péninsule - probablement arabique, allusion à l’actualité irakienne.

Les premiers sons font penser à un accordage de quatuor minimaliste ; puis, progressivement, le piano égrène son doux battement, préparant en douceur l’arrivée de cuivres recrutés pour masser les oreilles endolories. Musique douce pour bain chaud ou bulles de champagne éclatant dans une coupe - bref du caviar, servi à la louche.

Ça ressemble à quoi, le jazz de l’homme qui prétend faire de la musique avec un Levi’s ou un MacDo ? À un jazz soul sous influence bacharachienne mid tempo - un grand orchestre plutôt qu’un ensemble d’improvisateurs inspirés. Matthew joue sur les strates et les répondants sonores, à l’image des découpages du livret qui finissent par reproduire une image complète. Et cet espace d’impro est le point faible de l’album. Herbert, c’est jazzy trip hop, mais pas jazz. Déconstruction de sampling, « final touch » et joli son, mais l’ensemble est visqueux comme les enregistrements de musiciens de jazz qui se font accompagner par des violons sirupeux.

Ma déception ne tient qu’à une chose : le fait que j’aie trouvé cet album au rayon jazz. S’il avait atterri là par erreur, abandonné par un précédent visiteur, je n’aurais pas boudé mon plaisir en découvrant un excellent album de trip hop, lumineux et égaré. Mais à ce choix de positionnement, de marketing, je dis non.

par // Publié le 4 octobre 2003