Scènes

Michael Wollny [em] trio - Jazzycolors 2012

[em], trio allemand au succès grandissant, impulse des harmonies complexes dans un cocktail séduisant d’énergie, de fraîcheur et de maturité.


D’aucuns en France ont déjà repéré [em], ce jeune trio piano/basse/batterie qui connaît un succès grandissant sur la scène jazz allemande. Ses musiciens jouent ensemble depuis près de 10 ans et tracent leur voie en développant un style qui leur est propre. Pourtant ce n’était que la deuxième fois qu’ils se produisaient en France, le 7 novembre dernier, après un passage au Sunside il y a deux ans. De l’intérêt du festival Jazzycolors qui, chaque année en novembre, met en avant une sélection d’excellents groupes ou personnalités issues de 17 pays européens et trop méconnus de nos scènes parisiennes.

Michael Wollny’s [em] Photo Emmanuelle Vial

On peut qualifier son approche du jazz d’européenne : une tonalité très différente du jazz américain, hors des sentiers des standards, où chaque musicien apporte ses compositions. [em] initie certains morceaux par une ambiance contemporaine façon « bruitiste » ou évoque ici et là une bande originale de film, mais son répertoire repose toujours sur une composition structurée. En début de concert, il peut faire penser à l’E.S.T du début des années 2000, avec notamment l’utilisation de rythmes binaires. Mais peu à peu l’énergie et l’ambiance s’avèrent différentes, et le style est original, en particulier grâce à l’approche de jeu du pianiste. Malgré sa gestuelle singulière, Michael Wollny a de toute évidence suivi une formation classique. Il impulse des harmonies complexes et développe des solos violemment expressionnistes.

Michael Wollny Photo Emmanuelle Vial

Le trio ponctue son set de petites idées originales jouées avec archet, mailloche, gong chinois ou mini-métallophone. La contrebassiste contrôle son volume avec une pédale d’expression et utilise même, sur un morceau, une pédale d’écho. Souvent jouées en syncope, les lignes de basse d’Eva Kruse ont un phrasé intéressant et peu traditionnel. Quant au batteur Eric Schaefer, il déploie au fil du concert une large palette de jeu et surprend même l’auditoire avec une rythmique effrénée évoquant le « Billie Jean » de Michael Jackson, en plus free…

[em] LIVE est à l’image de ce concert au Goethe Institut, et reste un excellent moyen de découvrir ce groupe. Cet enregistrement public à la prise de son très soignée met bien en valeur l’énergie, la fraîcheur et la maturité de ce trio plus que prometteur. Mais il existe cinq autres disques, à écouter toutes affaires cessantes… Bref, on « [em] » ce groupe venu de l’Est, judicieusement retenu dans la programmation de Jazzycolors.