Noah Preminger

L’art de la ballade s’apparente à un chemin semé d’embûches. Enfiler des notes comme des perles permet de gommer des maladresses alors que de faire chanter savoureusement un instrument ne pardonne pas la moindre faute de goût. Ce défi caractérise le choix de Noah Preminger, celui de s’engager sur le fil de l’équilibriste avec une détermination tenace.

Ce saxophoniste s’est produit avec des monuments du jazz tels que Dave Holland, Roscoe Mitchell ou Fred Hersch, ce qui permet de mesurer l’aisance avec laquelle il développe ses phrasés d’une éminente douceur. Il s’inscrit ici dans la lignée du merveilleux Ballad enregistré par John Coltrane, sans toutefois se calquer sur l’esthétique originelle.

L’influence de Michael Brecker se ressent en particulier sur « Carry me Ohio ». Le quartet vise une perfection harmonique qui fait d’« Unfair World » un morceau à la fois serein et exigeant. À parts égales, les balades sont introduites trois fois chacune par le saxophone et par le piano. La batterie ouvre quant à elle « In Our 20s » qui s’épanouit avec une saveur latine. Allan Mednard, enrichi par son expérience musicale avec Kurt Rosenwinkel et Aaron Parks, déploie une sonorité feutrée propice à la contemplation. Julian Shore, remarqué avec Dave Striker et John Patitucci, installe un jeu pianistique fluide et perspicace en phase avec le parfait placement du tempo de la contrebasse de Kim Cass.

La composition quasi centenaire de George Gershwin « Someone To Watch Over Me » brille par son modernisme, à l’image de la synergie développée par ces quatre musiciens new-yorkais talentueux.