Chronique

Pearls Of Swines

Pearls Of Swines

Sarah Murcia (cla, voc), Gilles Coronado (g), Frédérick Galiay (b, voc), Franck Vaillant (dms)

Label / Distribution : Gazul Records

Avec Pearls Of Swines, le bassiste Frédérick Galiay réunit quatre musiciens qu’on a l’habitude de voir enjamber allègrement les genres musicaux, et ce pour évoquer les poèmes d’Edgar Allan Poe. Lui-même aime à terroriser les collectionneurs d’étiquettes : récemment entendu aux côtés de Thomas de Pourquery dans Supersonic, il anime avec le batteur Edward Perraud le duo Big, pur produit drum’n’bass. Toujours avec la même énergie et un jeu puissant qui n’est pas exempt de finesse

Ici, c’est avec une partie des musiciens de Caroline [1] que Galiay propose son rock sombre et capiteux. Seule surprise, mais elle de taille, Sarah Murcia troque sa contrebasse pour des claviers vintage acidifiant les trames électriques qui relient Galiay au guitariste Gilles Coronado. Quand, par exemple, elle murmure le court poème « Eulalie » dans l’atmosphère dense et nerveuse créée par le quartet, une tension diffuse, orageuse rend l’atmosphère irrespirable. L’alliance rythmique entre le bassiste et le batteur Franck Vaillant tombe dru et juste, puis la musique débonde et s’enfle à mesure que la batterie s’empare de la masse d’électricité, jusqu’à devenir inquiétante.

Chaque morceau est ainsi un tableau de l’étrange, depuis « Ligeia » et sa voix d’outre-tombe qui semble exhaler des synthétiseurs jusqu’à « When The Rest Of Heaven Was Blue » qui épouse les contours contondants de la guitare avant de finir dans un déluge. Mais ce sont les deux parties centrales de « The Raven » qui définissent au mieux une musique fortement teintée par l’école de Canterbury. Le ton gentiment méphitique de Murcia s’allie aux soubresauts précédant la raideur cadavérique d’une batterie intraitable pour transcrire à merveille une élégante ambiance victorienne, avant de se fracasser sur une rutilante électricité.

A l’instar du Palais de Justice de Bruxelles qui illustre la pochette, la musique de Pearls Of Swines est un perpétuel chantier où la démesure et le mélange des styles est une ligne de conduite. Il en résulte un album énigmatique et délicieusement entêtant qui accroche autant par la qualité de ses interprètes que par son imaginaire puissant.