Un disque de clarinettistes pour adeptes de l’instrument seulement ? Clarinet Latino ne saurait se résumer à cela : au départ, Philippe Berrod, musicien classique, a eu l’idée intéressante de réunir plusieurs praticiens de l’instrument dans une mosaïque de genres. Car ce premier volet de la série se place sous le signe du partage et du métissage. Quoi de plus naturel alors que de penser au Brésil, terre de croisements musicaux entre influences européennes, et plus précisément portugaises et africaines ?
La preuve en est donnée avec le « choro », genre musical né à la fin du XIXè siècle et vite devenu indépendant, basé sur l’échange entre instrument soliste (flûte ou clarinette), guitare (support harmonique) et support rythmique. Une musique du soleil, caliente, mais aussi teintée d’un soupçon plus ou moins marqué de saudade, une musique de l’âme qui évoque parfois le « soleil noir de la mélancolie » : car « chorar » signifie pleurer (alors que « xolo » étant le nom donné aux fêtes et danses afro-brésiliennes). Parmi ces créations inspirées des musiques latines, retenons surtout la « Rencontre » de Philippe Leloup, « une tournerie à sept temps, deux thèmes en mouvement contraire, arbitrés par une partie centrale plus calme », avec ses trois clarinettes - dont une basse - et ses guitares (Frédéric Favarel), et « Zapping trio », du marimbiste Eric Sammut, et ses effluves de tango, jazz et bossa. Et on retrouve avec plaisir Stéphane Chausse dans une vue de Corcovado, « Corcovista », pour trois clarinettes, guitares et percussions.
Un album réjouissant, une tentative réussie d’illustration d’un genre et d’une thématique que l’on croit connus, somme de ce que ce pays et ces musiques inspirent aux clarinettistes et autres instrumentistes (notamment aux percussionnistes), agrémenté d’un livret instructif et bien conçu. Travail soigné, idée à suivre… l’ensemble est recommandé.