Boni, Fernandes, Boni

Le chiffre 3 a son importance dans la carrière artistique de Raymond Boni. Témoins lez titre de son premier album solo, L’oiseau, l’arbre, le béton, paru chez Futura en 1971, témoins aussi ses divers trios : Nommo, où il côtoyait André Jaume et Gérard Siracusa, et Les Mistrals où il s’associait à Terry Day et Max Eastley. Energy Quest n’échappe pas à la règle : João Fernandes et Bastien Boni s’unissent aux démarches exploratoires du guitariste.

Raymond et Bastien Boni envoient leurs sons à l’instrument numérique de João Fernandes qui se charge de les manipuler en temps réel, la guitare et la contrebasse répondent ensuite à l’électronique. Ce résultat abolit les hiérarchies et permet de valoriser des élaborations structurelles comme dans « Phil M’ S Dance » et « Enigmatic Source » d’une expressivité désarmante à la contrebasse.

Capable de toutes les audaces et ne se laissant enfermer dans aucun style, Raymond Boni est l’un des rares précepteurs de l’instrument à six cordes. Son vocabulaire est immédiatement identifiable, à l’instar de celui de Django Reinhardt, ce qui en fait l’un des guitaristes les plus expressifs qui soient. Sa maîtrise de la tradition manouche tout autant que du noise rock ne peut être dissociée des innombrables sonorités qu’il tire de sa guitare. Ses improvisations parsemées de cellules rythmiques sont singulières, comme dans « Last Beam Of Energy » où Bastien Boni apporte des réponses additionnelles à l’archet. Les volutes sonores de « Tango On The Mountain Peak » et de « From Rio To Kiev Flight » échappent aux règles harmoniques. L’envoûtement qui envahit « Spectre de la turbulence » présente une étonnante corrélation avec le temps du rêve cher à la culture aborigène, le trio y est tout à la fois fantasque et inclassable.

Peu importe la finalité du discours musical et de ses élaborations, le hasard acquiert une importance notoire et il s’insère de manière captivante dans Energy Quest.