Roger Biwandu

Connaissez-vous le quartier Palmer ? C’est à Cenon, dans la banlieue bordelaise. C’est là que se déroule le quotidien du batteur Roger Biwandu, originaire de la République Démocratique du Congo (ex-Zaïre). Un quartier réputé « sensible », avec ce qu’il faut de diversité, voire de créolisation. En s’inspirant du titre d’un album de NWA qui fit date dans l’histoire du rap, « Straight Outta Compton », le musicien fait un beau pied de nez aux thuriféraires de la ghettoïsation et autres pourvoyeurs de stigmates invétérés. D’autant plus que ce quinquagénaire, sideman de renom (Marcus Miller, Dee Dee Bridgewater, Higelin…), a depuis longtemps quitté le quartier, sans pour autant cesser d’y revenir.

Ses compositions présentent une nette appétence pour un jazz plutôt « rock » et « progressif », avec une bonne dose de funk, sans négliger les incursions vers les rivages du hard-bop, voire du be-bop. Il se révèle ici comme un compositeur élégant, un batteur au jeu nuancé, sachant utiliser toutes les ressources musicales de son instrument, avec une prédilection gourmande pour la caisse claire. Il distribue la musique avec un sens affûté du collectif, en joueur de rugby passionné qu’il fut. Il a su obtenir la présence sur son disque de Biréli Lagrène, de Mario Canonge (magnifique biguine en duo piano/batterie) et d’Andy Narrel (ce trop rare joueur de steel-pan), sans oublier de convier ses enfants à s’exprimer parmi une pléiade d’invités, c’est dire son sens du partage. Un témoignage émouvant de la « présence d’ébène » au Port de la Lune.