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Edition du 24 mars 2024 // Citizenjazz.com / ISSN 2102-5487

Les dépêches

Sauvons « Agapes » et le C-Mal !

Communiqué :

L’association AGAPES s’apprête à fêter ses vingt ans de promotion d’une musique libre et innovante à Lyon. Adhérente à la Fédération des Scènes de Jazz, elle en respecte l’éthique, résumée en une charte qui stipule que l’association doit être porteuse d’un projet artistique et culturel faisant une large place à la création actuelle, française et étrangère, doit s’inscrire dans sa région en faisant un travail de repérage et de découverte de jeunes talents doit, enfin, respecter les obligations légales en matière de droit du travail et du droit social des artistes.

A l’heure où la question du renouvellement de la convention avec la Ville de Lyon et la DRAC se pose, l’association traverse une période d’incertitude quant à son avenir.

Plus que jamais, nous affirmons la nécessité de pérenniser une véritable scène dédiée aux jazz et musiques improvisées. Comme à Marseille, Nantes, Avignon, Lille… Lyon se doit d’avoir un équipement capable de recevoir musiciens et public dans les conditions professionnelles que ces musiques exigent.

Vous êtes nombreux à avoir manifesté le désir de nous soutenir. Nous appelons aujourd’hui le public et les professionnels à témoigner. Nous collectons dès aujourd’hui vos sentiments, votre perception du travail d’Agapes, vos attentes, vos suggestions…

Vos mails sont les bienvenus à l’adresse suivante :

contact@agapes-jazz.fr


Réaction de Bruno Tocanne, musicien, directeur artistique du réseau imuZZic

20 ans qu’Agapes n’a de cessé de découvrir de nouveaux talents, de les accompagner et de les suivre dans des conditions décentes, 20 ans qu’Agapes n’a de cessé de proposer, d’innover, de susciter des créations trans-générationnelles et multi-disciplinaires… 20 ans qu’Agapes accueille musiciens et publics avec respect et convivialité…

Alors que dans tout l’Hexagone et hors de nos frontières (y compris aux USA et au Canada, et je peux en témoigner), des musiciens, qu’ils soient émergents ou confirmés, se bousculent pour venir jouer dans de telles conditions et ce malgré le côté excentré de la salle Genton à Lyon, qu’Agapes est devenu auprès des médias, des réseaux nationaux et des publics une structure de référence, voilà que l’on nous annonce sa mort programmée !

Quand on sait en plus qu’Agapes, malgré le fait que ce soit la structure de la Fédération des scènes de jazz la plus mal aidée en France (10 fois moins que la moyenne des aides allouées à chacune de ces scènes !), malgré le fait qu’elle ait réussi à fidéliser un public dans une salle loin du centre et non dédiée au jazz et aux musiques improvisées, qu’elle a réussi à tenir contre vents et marées depuis si longtemps avec un certain nombre de sacrifices partagés par les artistes qui l’on soutenue, on a du mal à croire qu’une ville comme celle de Lyon puisse du jour au lendemain abandonner ce terrain, par le fait du prince, laissant un tel vivier totalement en friche…

Réduire les sommes (déjà ridiculement faibles) allouées à Agapes en tentant de faire des économies de bout de chandelles ou en les proposant à une autre structure sans tenir compte de leurs différences d’approche, le tout dans un secteur géographique déjà parmi les plus sinistrés en matière de diffusion et de création du jazz et des musiques improvisées, ne peut en aucun cas être considéré comme une politique culturelle publique digne de ce nom !

La création musicale se vit au quotidien en s’exposant le plus souvent possible sur scène, dans des lieux à dimension humaine qui permettent de rencontrer toutes sortes de publics. Sûrement pas au coup par coup et seulement sur des « événements » médiatiques fabriqués de toutes pièces ni en abandonnant le terreau de la création aux bars ou clubs payant les arstistes aux entrées…

Si réellement les collectivités territoriales souhaitent privilégier, comme elles l’affirment à longueur de temps, les scènes qui travaillent sur l’émergence, il serait temps qu’elles réalisent à quel point des structures comme celles d’Agapes sont primordiales pour celle ci !

Offrir à de jeunes musiciens l’opportunité de travailler dans des conditions salariales en conformité avec la législation, d’inviter et de rencontrer des musiciens du monde entier avec lesquels une majorité d’entre eux travaillerons par la suite régulièrement, leur offrir également une possibilité de « suivi de carrière » entre autres en les invitant régulièrement à se produire… c’est tout de même une des manières les plus efficace de les mettre en phase avec les réalités de ce métier !

De plus, ne concevoir l’aide à la création musicale que par le biais de l’émergence relève d’un parti pris pour le moins surprenant… Même si l’on a bien compris qu’il est plus gratifiant pour nos élus d’aider à peu de frais des jeunes musiciens dits émergents que de penser une réelle ambition politique en faveur de la diffusion des musiques actuelles les plus innovantes, en y mettant de réels moyens et en tenant compte de la totalité de ses acteurs, dont un grand nombre est en grandez difficulté…

Pour finir (!) il est clair, d’un point de vue plus personnel, qu’un collectif comme le réseau imuZZic n’aurait jamais vu le jour en Rhône-Alpes sans le soutien d’Agapes et que les créations avec qui elles ont été co-produites, qui pour la plupart tournent ensuite dans le monde entier, n’auraient jamais été créées à Lyon !

Je me tiens prêt à me battre, aux côtés d’Agapes et par tous les moyens, pour que non seulement cette structure continue à vivre mais qu’en plus elle puisse enfin bénéficier d’un lieu consacré au jazz et aux musiques improvisées, d’aides à la hauteur des enjeux. et d’un montant en rapport avec ce qui est investi sur le jazz et les musiques improvisées par de nombreuses villes en France.

  • Bruno Tocanne, juin 2009