Un album de Gil Evans, enregistrement d’un live donné en 1986, à la fin de la vie de cet immense maestro à Hambourg donne de quoi saliver abondamment, d’autant plus que Live at Fabrik est un double album. On ajoutera que les plus de deux heures de musique s’étalent au gré de seulement huit morceaux. Il y a vraiment de quoi se laisser transporter.
On retrouve ici une set-list largement constituée de compositions de Jimi Hendrix, dont le toujours incroyable « Little Wing » et ses développements de 18 minutes ici. On est franchement abasourdi. L’orchestration, magistrale, complexe, volumineuse, souveraine laisse complètement baba. On a en tête bien entendu le concert que le Gil Evans donnait la même année à Umbria avec Sting notamment, l’album de 1974, The Gil Evans Orchestra Plays The Music of Jimi Hendrix et le projet, malheureusement avorté, d’un album arrangé pour ce même Hendrix. Reste que la figure du guitariste de Seattle est omniprésente (quatre morceaux sur huit dont, en plus de « Little Wing », « Stone Free », « Up from the Skies » ainsi que « Voodoo Chile ») et que les arrangements d’Evans constituent un écrin génial. On notera en outre la présence à la guitare d’Hiram Bullock, à peine trente ans alors, et qui enregistrera plus tard, mais dans une autre veine, avec le WDR Big Band Köln et Billy Cobham, un répertoire consacré là encore à Hendrix.
La comparaison avec Umbria et The Gil Evans Orchestra Plays The Music of Jimi Hendrix s’arrête là. Car si on retrouve des orchestrations semblables, le Live at Fabrik est plus rêche, plus dur, plus brutal aussi.
S’il ne fallait ne retenir qu’un qualificatif pour caractériser cette musique faite de rock, de pointes indus et qui s’affranchit des canons esthétiques, ce serait « génial ». Et on imagine que les chanceux qui ont pu fouler le Fabrik ce jour-là doivent avoir le souvenir impérissable d’avoir assisté à un concert historique. Ils ont bien raison : c’est indiscutablement le cas.