Chronique

Tom Kessler

Nuevo Valso

Tom Kessler (g), Eivind Opsvik (b), Jochen Rückert (dms)

Label / Distribution : Unit Records

C’est un symbole urbain qui est l’un des plus grands mystères et connaît de multiples interprétations. Les baskets nouées entre elles et balancées en équilibre sur un fil électrique peuvent être tout à la fois : la marque de l’entrée dans un quartier populaire et dense, un simple jeu potache ou l’indication d’un lieu de vente de stupéfiants. C’est désormais aussi la pochette de Nuevo Valso, nouvel album du guitariste mexicain installé à Berlin Tom Kessler, dans une approche graphique qui réunit lignes claires et points de rencontre et d’achoppement. Un résumé assez simple d’un disque en trio dont le classicisme se pique d’élégance et d’une liberté qui ne sacrifie pas la joliesse, comme en témoigne « Labrador », où la guitare discute avec la contrebasse du norvégien Eivind Opsvik - souvent entendu aux côtés de Craig Taborn - en compagnie d’ailleurs du batteur Jochen Rückert qui impressionne dans cet album.
 
Tout dans Nuevo Valso appelle à la simplicité : le son de Kessler, extrêmement pur et avec peu d’effet si l’on excepte la distorsion de « Blues Me » qui évoque comme un relief étrange et se marie parfaitement avec le jeu sobre de ses compagnons. Le guitariste, que l’on a pu entendre avec Elliott Levin, ne force jamais son jeu et laisse beaucoup de place au batteur qui va lui aussi toujours à l’essentiel. Sur « Tres Acordes » qui débute dans une atmosphère moins lumineuse que la plupart des autres titres, la guitare semble poindre d’un roulement de caisse claire sans excès, à peine rehaussé d’une ligne de basse d’une grande rondeur.
 
Dans ce disque sans volonté soliste – la guitare s’échappe quelques instants dans « Chasquinho » -, où le dialogue collectif prime malgré le leadership incontesté de Kessler, la base rythmique est la trame essentielle de ce trio, offrant au Mexicain une grande liberté mélodique, à l’instar de « Serpentina », ballade languide où la batterie est la garante d’une métrique rigoureuse. Ce n’est qu’avec « Swanzira », où Opsvik passe à l’archet, que le propos devient plus abstrait et que la guitare change de rôle, laissant à Rückert une place de choix. Une belle rencontre.

par Franpi Barriaux // Publié le 26 mai 2019
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