Chronique

Trio BIS

Live

Cédrick Bec (d), Raphaël Imbert (sax) et Alain Soler (g)

Label / Distribution : Durance/Orkhêstra

L’album débute avec une interprétation presque classique de « Lulu’s Back in Town ». On ne boude pas pour autant notre plaisir grâce, notamment, à un chorus carabiné de Raphaël Imbert. Mais qualifier de classique ce disque, c’est tout de même se méprendre - ne serait-ce que parce que ce trio sans basse est en soi une configuration peu commune. En outre, quand on sait que Cédrick Bec est aux manettes de Oust !, un power rock hyper efficace, et qu’Alain Soler est, entre autres, le fondateur de l’Atelier de Musiques Improvisées, on comprend que « classique » n’est peut-être pas bien adapté. On dira plutôt que c’est à partir du second morceau que les trois musiciens nous font entrer dans leur univers débridé. Débridé car on sent que cette musique est faite sans réserve.

Difficile ensuite de caractériser ce disque d’un seul qualificatif, puisqu’on y trouve du blues, à l’instar de « Tom Traubert’s Blues/Hard Times », medley de deux ballades poignantes signées Tom Waits, ou encore de « On the Beach/Equinox », deux pièces en une respectivement composées par Neil Young et John Coltrane et introduites par un solo complètement habité de Cédrick Bec. Près de dix minutes envoûtantes et mystiques. On trouve en outre une interprétation de « In Walked Bud » de Monk menée sur les chapeaux de roues. Trois instruments, trois chorus qui se succèdent. Une structure qui nous rappelle que les thèmes de Monk sont parmi les plus visités. C’est du haut de gamme. « Talk To Me Like the Rain », une composition de Raphaël Imbert, ici à l’alto, est plus dans la dissonance. Tandis que « Waltzing On The Air », une composition d’Alain Soler, commence comme une ballade puis va crescendo dans un registre exalté. Mais d’Alain Soler, peut-être plus que la composition qu’il signe, fort belle par ailleurs, on retiendra ses solos terriblement efficaces. On le soulignera d’autant plus volontiers qu’il n’y a ni basse, ni autre instrument, sinon la batterie, pour mettre ces chorus en relief. On trouve également une reprise très libre de « No Reply » des Beatles dans laquelle le saxophoniste officie au soprano. Tiens : « libre » ? C’est peut-être ce qualificatif qui est le plus pertinent pour cet album dont le titre, Live, ainsi que l’intitulé du groupe, trio BIS, entendez Bec, Imbert, Soler, sont à l’image de ce qui est proposé ici : une rencontre pour et autour de la musique vivante. Car on perçoit que les musiciens se cherchent, se jouent des uns et des autres. Bref… s’amusent. En même temps qu’ils élaborent cet univers atypique.