Historien de formation et de profession, Howard Zinn était une figure intellectuelle américaine. Pacifiste et acteur important du mouvement de désobéissance civile, il a fait l’objet dernièrement d’un film d’Olivier Azam et Daniel Mermet, lui aussi intitulé Howard Zinn, loin de l’ombre, dont Vincent Ferrand a écrit la musique.
Si le disque n’est pas la BO du film, son titre y renvoie ; et c’est un album de chansons et de musiques de résistance que signe là le contrebassiste toulousain. On trouve de superbes interprétations : « Le Temps des cerises », épuré et sensible, ou encore une version pleine d’émotion de « Bread and Roses ». Ce poème de James Oppenheim écrit au tout début du XXe siècle et associé à la « Bread and Roses Strike » — grève du textile à Lawrence dans le Massachusetts en 1912 - y trouve tout naturellement sa place. L’album se termine avec une version poignante de « We Shall Overcome » par le quintet Ostaar Klaké ; cette chanson, précisément, clôturait habituellement les manifestations du mouvement américain des droits civiques. Cet agencement donne à cet album une figure de manifeste. Et choisir de terminer en invoquant un triomphe à venir est autant un mot d’ordre qu’une saine bouffée d’oxygène.
Cette ode à la résistance et à la révolte est subtilement amenée à l’image de « L’Impossible neutralité » – titre d’un ouvrage d’Howard Zinn – pour lequel Vincent Ferrand ferraille à l’archet de manière obsessionnelle. Textes et musiques, parfois dans une perspective bruitiste, se font écho. Entre ces murmures qui traversent le disque – paroles susurrées ou notes qui chuchotent – on entend gronder, puissant, l’espoir de tous ceux dont les droits sont bafoués – esclaves, Amérindiens, communards, privés de droits sociaux…