Arrivé récemment dans le monde du jazz, Yaron Herman n’a pas raté son entrée : trophée « Nouveaux Talents » du Sunside à l’unanimité, Take 2 To Know 1 en duo avec le batteur Sylvain Ghio pour Sketch, conférences sur la « Real Time Composition » à la Sorbonne… Et voici que le pianiste sort Variations, un album enregistré en solo pour un nouveau label : Laborie.
L’album présente l’intérêt de s’articuler autour de trois variations, de trois ou quatre mouvements. Or, la « forme-variation » va comme un gant au jazz.
Herman décline la première sur « Summertime ». Après une exposition plutôt torturée du thème, le pianiste part sur du velours dans des variations débouchant sur un développement tout à fait « jarrettien », et qu’il appelle d’ailleurs « Facing Him ». Cette première série s’achève sur le superbe « Jerusalem Of Gold », célébrissime chanson que Naomi Shemer avait composée en 1967 sur les bases d’une berceuse basque.
La deuxième variation n’est pas si éloignée de l’esprit des frères Belmondo : Herman reprend le Requiem de Fauré en commençant par le majestueux « Libera me » qu’il interprète à mi-chemin entre classique et jazz. La fugue qui suit est prétexte à un jeu rythmique qui évoque ça et là Lennie Tristano (« Requiem » n’est pas loin…). Avant de conclure sur le « Pie Jesu » de Fauré, le pianiste intercale « Eli Eli », superbe mélodie signée David Zehavi.
Enfin, le troisième « jeu » d’Herman dérive d’un thème juif traditionnel, « Ose Shalom », passe par un amusement sous forme de gouttes de notes, puis se termine sur une comptine, plus sérieuse qu’il n’y paraît.
Pour boucler le disque, Herman a ajouté une version de « Fragile », le tube de Sting, aussi subtile que dansante sur laquelle il s’accompagne au cajon ou à l’aide d’un pad. Variations se conlut sur le mélancolique « Hommage à Francis Paudras » de Clare Fischer.
Yaron Herman est un pianiste de neurones et de tripes : de neurones pour ses références, ses recherches et cet éclairage classique dont il illumine toute sa musique ; de tripes pour son jeu puissant, sa sensibilité à fleur de peau, et cette tension omniprésente tout au long de l’album.
Avec Variations le pianiste a fait mouche, et souhaitons que ce disque soit le premier d’une longue série…