Chronique

Yeliz Trio

Wanderer

Karsten Hochapfel (cello), Mathieu Bélis (p), Thomas Ostrowiecki (d, elec, fx) + Daniel Zimmermann (tb), Matthieu Michel (fh).

Label / Distribution : Auto Productions

En conviant Karsten Hochapfel pour leur second album, les deux musiciens à l’origine du Yeliz Trio, le batteur et électronicien Thomas Ostrowiecki et le pianiste Mathieu Bélis ont fait le choix d’un univers riche et changeant. À la base du répertoire de Wanderer, toujours un attrait particulier pour un jazz qui se plaît à regarder du côté d’EST et des orchestrations autour d’un piano insistant et volubile (« Fury Road ») que le violoncelle nourrit de belles digressions. Il y a un bel équilibre au sein du trio, quelque chose qui s’est trouvé à l’occasion de ce second album, et l’approche généreuse d’Hochapfel n’y est pas étrangère. Qu’il soit en re-recording, ajoutant plusieurs voix sur « Beyond The Moor » ou que son archet traverse un brouillard électronique (« Danakil Depression »), il donne souvent la direction que les rythmiques d’Ostrowiecki habillent à merveille.

Le parti-pris très mélodique de Yeliz Trio laisse peu de place à l’errance et au silence, mais le trio parvient à nous faire voyager autrement ; à l’instar de « Docteur Jekyll et Mister Gray », Bélis qui joue très en avant, avec une main gauche puissante, sait emmener le violoncelle sur un terrain plus accidenté qui donne davantage d’espace. Même chose avec le morceau-titre « The Wanderer » où l’archet d’Hochapfel s’immisce dans une rythmique percluse d’électronique pour proposer un ailleurs plein de reliefs et de surprise. Le musicien d’Odeia connaît suffisamment les folklores, qu’ils soient imaginaires ou pas, pour infléchir une mécanique très huilée et lui donner un souffle nouveau.

Bélis et Ostrowiecki sont d’ailleurs eux-mêmes très influencés par la sono mondiale, qu’elle soit africaine (subsaharienne ou non) pour le batteur, ou brésilienne ou indienne pour le pianiste. Leurs collaborations multiples, de Mano Solo à Souad Massi ont ouvert grandement leurs univers musicaux qui se révèlent dans cette approche très contemporaine au format chanson, échauffé par des cordes très incarnées qui en révèlent tout le charme.