Chronique

Ozma

Welcome Home

Édouard Séro-Guillaume (elb), Stéphane Scharlé (dms), Tam de Villiers (g), Julien Soro (sax), Guillaume Nuss (tb).

Label / Distribution : Cristal Records

Welcome Home, le sixième album d’Ozma, est sorti à l’automne 2016 sur le label Cristal Records. Le temps passe vite. Est-ce une raison pour passer ses qualités sous un silence durable ? Certainement pas…

Ozma tire son nom d’un vieux projet de la Nasa dont l’objectif était de détecter les signes d’une vie extra-terrestre. Ce qu’on pourra comprendre comme une incitation à ne jamais se résigner et à envisager tout projet comme une étape dans un long chemin. Dont acte. Pour ce qui concerne ce groupe emmené par une cellule rythmique alliant puissance et souplesse, souvent animée de cette joyeuse arythmie si chère aux amoureux des métriques impaires (Stéphane Scharlé à la batterie et Édouard Séro-Guillaume à la basse, qui sont en outre les deux compositeurs de tout le répertoire), tout a commencé il y a plus de quinze ans.

D’emblée, on a compris que le mélange des genres serait source du meilleur. Ozma est voyageur : le groupe s’est produit dans un grand nombre de pays par-delà les continents ; cinéphile : en témoignent une série de ciné-concerts au fil de son histoire ; il allie avec un plaisir égal les élans exploratoires du jazz et l’énergie électrique du rock. Pour ne rien gâter, il jalonne son parcours de disques à intervalles réguliers : Ozma (2005), Electric Taxi Land (2007), Strange Traffic (2009), Peacemaker (2011), New Tales (2013). Une publication tous les deux ans, dont le principe est à peine contrarié par le délai supplémentaire imposé à la parution de Welcome Home (2016). Peut-être fallait-il ce temps additionnel pour faire place à deux nouveaux venus, et pas des moindres : Julien Soro (saxophones) et Tam de Villiers (guitare), tandis que Guillaume Nuss (trombone) retrouvait la maison après une absence de près de dix ans. Le groupe revient ainsi à la formule sonore qui était la sienne jusqu’en 2009 et s’affiche à nouveau comme un quintet.

Welcome Home est un concentré d’énergie et un objet musical de la jubilation. Il n’est que d’écouter les interventions gourmandes des soufflants ou celles, toujours justes – parfois marquées d’accents que ne renieraient pas un Steve Reich (« Magnus Effect ») ou un Robert Fripp (« Electric Lament ») – de la guitare pour s’en convaincre. Derrière eux, la paire fondatrice mène le bal et entraîne son monde dans une danse qu’on voudrait croire perpétuelle. L’accalmie existe, mais jamais sans raison. Ce sera par exemple une exploration des profondeurs aquatiques à l’occasion d’un « Concerto for Sharks », pour mieux exploser en un final festif. Ou la vision contemplative d’un week-end quelque part du côté du Kashmir. Mais c’est avant tout le groove qui porte les cinq musiciens, unis au service d’une même cause : celle d’un collectif ouvert à une grande diversité de styles, propice à l’élaboration de textures sonores d’une grande richesse (la paire Soro-Nuss fait montre de toute sa soif de couleurs et de conversation), offrant à chaque instrumentiste un large espace d’expression.

Welcome Home est un voyage de plus pour Ozma, ou plutôt une succession de dépaysements d’un continent à l’autre. Pour dire les choses franchement, c’est le moins qu’on puisse attendre d’un groupe qui a su faire montre de tout son savoir-faire en ce domaine depuis 2001. Comme à chaque fois, le disque est une invitation à la découverte faite à celles et ceux qui viendront vers lui, certains du plaisir qu’ils y trouveront. Les autres peuvent essayer, ils ne le regretteront pas.