Chronique

Ulrich Gumpert Quartett

a new one

Ulrich Gumpert (p), Jürg Wickihalder (ts), Jan Roder (b), Michael Griener (dms)

Label / Distribution : Intakt Records

A 70 ans, le pianiste Ulrich Gumpert n’a pas fini de s’amuser. C’est le message que nous envoie a new one, son second album avec un quartett quelque peu remanié. Un nouvel ensemble, un nouveau disque, un nouveau partenaire en la personne du saxophoniste Jürg Wickihalder… Tout dans cet album sorti chez Intakt Records a l’odeur de neuf ; un neuf certes patiné par son obsession pour Satie, ou par ses aventures en compagnie de ses compères du Zentralquartett, Günter « Baby » Sommer en tête. Une expérience qui n’hésite jamais à se régénérer auprès de la jeune génération : on se souvient de son passionnant duo avec Silke Eberhard. Avec sa base rythmique gourmande, composée du batteur Michael Griener (qu’on a vu avec Rudi Mahall) et du bassiste Jan Roder (habitué comme les autres compagnons du pianiste de l’univers d’Aki Takase), il n’hésite jamais à densifier un jeu percussif caractéristique.

Ainsi, « A New One », opportunément écrit par Wickihalder est un amalgame complexe dans lequel des martèlements sporadiques viennent emporter les ostinatos du soufflant. On pense à Lacy ; on a raison : Gumpert a longtemps collaboré avec lui et c’est clairement un modèle pour le saxophoniste et le batteur, qui participe à un trio en mémoire du célèbre soprano (Lacypool, avec Kristof Thewes au trombone). On en trouve de nombreux sédiments dans la mélodie faussement lunaire de « Recitativo Secco », où Wickihalder et Roder jouent à l’unisson, avant d’être rejoints par un piano qui a fait de l’économie de geste et du silence évocateur un style à part entière. Les musiciens qui l’entourent sont rompus à l’exercice : nous avions noté à quel point le récent duo du saxophoniste avec Irène Schweizer évoquait celui de Gumpert avec Eberhard.

Mais il serait bien injuste de résumer ce disque à cette direction. Quand l’hôte s’amuse, et cela fait maintenant plusieurs décennies qu’il mâtine sa jovialité d’une grande élégance, il sait aller visiter à peu près toutes les couleurs du jazz avec une certaine malice. Ainsi, « The Opener » se révèle très coltranien quand « Iffie’s Saloon » est une petite sucrerie finale, légère comme une bulle de savon. Entre deux, ce quartett aura rendu hommage à l’ami du Zentralquartett Ernst-Ludwig Petrowski (« 100 Maasgelinzerte ») et offert une passe d’armes collective (« The Bop and The Hard Be ») qui, à elle seule, mérite qu’on s’intéresse à cette jolie rencontre.