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Edition du 23 avril 2024 // Citizenjazz.com / ISSN 2102-5487

Les dépêches

E.S.T. : « Tuesday Wonderland »

Communiqué :

Nouvel album : Tuesday Wonderland

Label ACT

E.S.T.


Photo Gunnar Holmberg

L’Esbjörn Svensson Trio est surprenant : un trio de jazz qui se considère lui-même comme un groupe de pop, qui joue du jazz en élevant la conception traditionelle de liberté d’action du leader et de ses sidemen au même niveau, qui remplit non seulement les clubs de jazz mais également les salles habituées aux groupes de rock, dont les prestations sont souvent agrémentées de jeux de lumière et de brouillard. Et qui arrive, à la fin de ses concerts, à faire chanter des standards de jazz tels que « Bemsha Swing » de Thelonious Monk à tout un public et fait exploser le cadre classique du trio de jazz. En Suède, pays d’origine du trio, E.S.T. trouve régulièrement sa place dans les pop charts, ses video clips passent sur MTV Scandinavia. Avec ses sonorités uniques qui allient jazz aux grooves drum & bass, à certains éléments de musique éléctronique, rythmiques funky ou emprunts au rock et à la pop mais également à la musique classique européenne, E.S.T. a conquis un public allant des fans de jazz aux amateurs de hip hop. Maintes fois récompensé par des prix, le trio a persuadé les critiques et le publique du monde entier d’une chose : E.S.T. est l’un des groupes les plus innovants de la scène jazz actuelle.

L’ouverture d’esprit, la curiosité et un brin de chance expliquent la qualité artistique de Svensson : « J’ai commencé le piano car nous n’avions pas d’autres instruments à la maison. En fait j’aurais préféré la batterie. Mais Magnus Östrom est arrivé, et j’ai décidé de ne rien changer. Magnus et moi avons grandi ensemble. Quand Magnus a recu son premier set de batterie, il est venu chez moi et nous avons commencé à jouer. Nous n’étions pas doués mais nous nous sommes éclatés ! Comme nous n’avions pas de professeur, et que personne ne nous enseignait la technique, nous avons réussi à développer progressivement notre propre style ».

Esbjörn Svensson ouvre le coffre du piano, joue avec les cordes, recherchant le son d’une guitare. Il expérimente tout de manière très prudente avec des accents percussifs, et plonge dans les profondeurs des formes inspirées par la musique orchestrale. Soucieux d’un équilibre musical, il joint certains éléments électroniques à sa vision musicale créant ainsi un mélange optimal de sonorités. Il ajoute à ses créations de nouvelles voies d’harmonisation, des variations mélodiques surprenantes et des motifs saisissants. Sa musique est des plus efficaces, d’autant qu’elle ne prétend pas assurer la survie d’un genre en particulier.

Esbjörn Svensson est né en 1964 à Västeras, en Suède. Sa mère jouait du piano classique, son père était un fan d’Ellington, et Esbjörn écoutait les derniers tubes de pop à la radio. Au lycée, Esbjörn commenca à jouer dans différents groupes, tout en prenant des lecons de piano. Il fit des études de musique durant les quatre années qui suivirent à l’Université de Stockholm, qui lui permirent de développer les qualités techniques nécessaires à l’expression maximale de ses concepts personnels.

Ainsi, la liberté et l’éxubérance qui caractérisaient sa musique se développèrent en conscience créative. Aux côtés de musiciens suédois tels que Jan Johansson, Svensson considère aujourd’hui Chick Corea et Keith Jarrett comme ses influences majeures. Il est capable d’emprunter leurs caractéristiques stylistiques respectives, pourtant distinctes, et de les adapter à sa propre vision musicale.

Depuis le milieu des années 80, Svensson est un musicien reconnu sur les scènes jazz suédoise et danoise. Il forma son propre trio en 1990, mais ce n’est qu’en 1993 qu’il sentit le besoin de produire un album. Il rencontra la même année Dan Berglund sur scène, fut fasciné par la puissance de ses structures et la diversité créative de son jeu, et réussit à le convaincre de joindre le groupe. La même année, le Esbjörn Svensson Trio enregistrait son premier album When Everyone Has Gone (Dragon). En 1995 suivit le live Mr. & Mrs. Handkerchief (Prophone), réédité 6 ans plus tard sous le titre E.S.T. Live ’95 dans le reste de l’Europe.

Au milieu des années 90, le trio s’était déjà fait un nom dans son pays d’origine, ce qui déboucha sur un contrat avec la maison de disque à orientation musicale plutôt pop Superstudio Gul / Diesel Music, qui la même année éditait EST Plays Monk qui se vendit très rapidement à plus de 10.000 exemplaires en Suède.

Le jeune talent commença à accumuler les récompenses : En 1995 et 1996, il fut élu Swedish Jazz Musician of the Year, et Meilleur Compositeur en 1998. L’album Winter in Venice paru en 1997 et formé presque uniquement de compositions propres fut récompensé par un Grammy suédois.

Svensson conquit la scène jazz européenne entre autre grâce à sa collaboration avec des musiciens tels que Alex Riel, Mads Vinding, Victoria Tolstoy (White Russian, Blue Note 1997), et surtout Nils Landgren avec lequel il enchanta le public lors du concert du Nils Landgren Funk Unit au Montreux Jazz Festival en 1998.

L’album From Gagarin’s Point of View qui parut en 1999 marqua un tournant dans la carrière du trio. Grâce à son rapprochement avec le label ACT et à des concerts au festival Jazz Baltica et au Montreux Jazz Festival, E.S.T. explosa au niveau international.

Une année plus tard, Good Morning Susie Soho valut à E.S.T. le titre de « Trio of the Year » (Jazzwise, UK). Le trio tourna dans toute l’Europe sous le signe des « Rising Stars », participa aux plus grands festivals et enthousiasma Sony Columbia / USA à tel que point que le label décida d’éditer un premier CD du trio aux Etats Unis.

La tournée mondiale du trio à l’occasion de la sortie de son nouvel album, Strange Place for Snow, dura non moins de neuf mois. Après un passage en Europe au début de l’année, le groupe s’est rendu aux Etats Unis et au Canada au moment de la sortie de l’album en Juin. Le magazine américain Downbeat annoncait la tournée du trio avec euphorie : « One of the hottest jazz acts in Europe today » : les clubs de jazz et d’avant-garde les plus importants à New York, Chicago, Washington, Seattle, San Francisco et Los Angeles tout comme les plus grands festivals à Boston, Torronto, Vancouver et Montreal les ont accueilli. En Juillet, le trio s’est produit sur les plus prestigieux festivals (North Sea Festival, Montreux, Perugia, Pori..) de l’Europe et continua sa tournée jusqu’en novembre.

À la recherche d’une musique adaptée à son premier film Dans ma Peau - sorti dans les salles françaises début décembre 2002 - la jeune actrice, scénariste et réalisatrice Marina de Van tomba un jour sur l’album « Strange Place for Snow » et décida tout de suite d’en faire la bande originale. En même temps est né, sous la direction de Marina de Van, le vidéoclip de « Serenade for the Renegade » - un des morceaux les plus marquants de l’album et un superbe hommage à Radiohead.

E.S.T. vient de recevoir le « German Jazz Award » ainsi que le « Prix de l’Année » du jury des critiques allemands. En France, le magazine Jazzman leur a décerné début décembre le « Choc de l’Année » pour « Strange Place for Snow ». E.S.T. est de surcroît nominé aux Victoires du Jazz 2003, dans la catégorie « Révélation internationale de l’année ». A cette occasion, le trio jouera un de ses morceaux lors de la cérémonie, qui sera retransmise en direct sur France Inter et Mezzo (en différé sur France 3) le 22 janvier 2003 depuis le Grand Auditorium du Palais des Festivals de Cannes. (Tous droits réservés)

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