Fur
Bond
Hélène Duret (cl, clb, voc), Benjamin Sauzereau (g), Maxime Rouayroux (d, obj).
Label / Distribution : BMC Records
On peut passer (et perdre) beaucoup de temps à imposer sa définition du jazz et à en délimiter les contours de façon restrictive. Certains s’en font même parfois une spécialité… Mais plutôt que d’élever des murs soi-disant infranchissables et d’appeler au repli sur l’entre-soi, quoi de plus réjouissant qu’une formation qui choisirait d’enjamber joyeusement toutes les barrières et d’ouvrir en grand les frontières des musiques ? Fur est assurément de celles-là : ce trio hors étiquettes, déjà à l’œuvre il y a trois ans dans une Boîte noire aux nuances feutrées, récidive cette fois par un Bond beaucoup plus allègre et dégoupille une série de miniatures comme autant de scénarios possibles destinés à des courts-métrages multipliant les rebondissements.
Cette musique au montage nerveux se présente comme un savant cocktail d’influences multiples : on y trouve des mélodies aux couleurs pop, des fulgurances très rock, des surprises en toute liberté qui seraient celles d’un jazz malicieux, des trouvailles sonores et plein d’autres choses encore, mixées et servies par Hélène Duret (clarinette et voix), Benjamin Sauzereau (guitare) et Maxime Rouayroux (batterie et objets divers). Et ce qui est assez formidable dans cette conjonction d’événements, c’est qu’elle vous laisse dans un état de bien-être dont on se dit qu’il s’apparente à une nécessité en nos jours de pessimisme entretenu. Quel plaisir en effet que de ne pas savoir à quoi s’attendre au moment où chacune des histoires commence ! Et comme les instruments savent vous surprendre à chaque instant : la batterie et les objets sont imprévisibles, souvent facétieux ; la clarinette sait vous caresser de son chant juste avant de gémir en une plainte aiguë comme un animal blessé ; la guitare brûle de riffs autant qu’elle sait être fluide comme l’eau de la rivière.
Fur a, en outre, la capacité de marier avec une apparente aisance exigence et accessibilité. Il n’y a rien d’obscur ni de rebutant dans ces petits mondes multicolores, bien au contraire. C’est décidément un Bond de joie. Et une nouvelle pépite à mettre au crédit du label BMC, dont on doit aussi souligner la qualité de finition des objets disques. Bondissons donc de joie avec Fur, et sans mesure !