Chronique

Mihály Dresch Quartet

Live in London

Mihály Dresch (ts, ss, voc), Miklós Lukács (cimbalom), Marcell Gyányi (b), László Csízi (d).

Label / Distribution : Morotva Records

Véritable pilier du jazz hongrois, l’un des premiers à avoir enregistré une musique libre et farouche en intégrant des instruments ancrés dans la culture magyare et d’Europe Centrale (fuhun, kaval, cymbalum…), Mihály Dresch n’avait pas donné des nouvelles de son quartet depuis quelques années et un discret Arniékban paru sur le label Fonó. Mais 2024 est une année à part pour le Mihály Dresch Quartet (MDQ), puisqu’il fête ses 40 ans [1]. Aujourd’hui, c’est sur le jeune et prometteur label Morotva Records que Dresch nous offre de célébrer ces quatre décennies avec un Live in London roboratif qui doit beaucoup au cymbalum de Miklós Lukács, qui s’offre des échappées belles sur « Nomád » ou propose de confortables tapis de cordes sur le très introspectif « Sirató ».

Complices depuis très longtemps, Lukács et Dresch sont très complémentaires : avec le très enlevé « Té-ka-ta », on peut entrevoir ce goût commun pour la fougue poussé dans les derniers retranchements avec ce cymbalum plus souple que tous les pianos et ce paradigme coltranien qui nourrit le saxophoniste. Mais les deux musiciens, qui avaient enregistré en duo un très beau Labirintus chez Fonó en 2013, voient leur dialogue permanent mis en exergue par une base rythmique nouvelle venue, en grande forme elle aussi ; László Csízi est un batteur qu’on a l’habitude d’entendre dans le Modern Art Orchestra. C’est lui qui tient la maison sur « Arniékban » tiré du dernier album. Quant au contrebassiste Marcell Gyányi, il fait partie de la nouvelle génération de musiciens hongrois qui gravitent autour du label Morotva. Il est par ailleurs le leader du quintet New Fossils.

On appréciera son travail sur « Nomád » ou sur l’étincelant « Jó Hir » où il emmène l’orchestre dans une danse traditionnelle et fait chanter Mihály Dresch, qui ne se fait jamais vraiment prier pour cela. Ce morceau est clairement le temps fort d’un album qui se décline en un double album plus long sur les plateformes de streaming [2]. C’est une véritable fête du jazz hongrois sans invités [3] : heureux Londoniens qui ont profité de ce concert !

par Franpi Barriaux // Publié le 8 juillet 2024
P.-S. :

[1Fondé en 1984 avec le line-up suivant : Mihály Dresch (as, fuhun), István Grencsó (ts), Róbert Benkó (b), István Baló (dms), il sort (en K7 !) un premier album, Sóhajkeserű, en 1985. Joie d’internet, on peut l’écouter ici. Le quartet a souvent évolué dans le temps, et a compté parmi ses membres le regretté Mátyás Szandai.

[2On s’étonnera de cette pratique nouvelle qui consiste à proposer plus en gratuit qu’en payant…

[3Dans de précédents albums du quartet, Dresch avait convié Chris Potter ou Archie Shepp pour le fondateur Hungarian Be Bop.