Ornella Noulet

Phénomène en maturation depuis quelques années sur les scènes si fructueuses de Belgique, la saxophoniste Ornella Noulet n’attendait plus qu’un acte fondateur pour incarner une trajectoire assez miraculeusement rectiligne. Comme Sakina Abdou il y a quelques années, c’est le label étasunien Relative Pitch, dont les oreilles ont toujours été très ouvertes à l’émergence européenne, qui lui propose l’opportunité d’enregistrer Promise of Faithfullness, un solo qui permet d’imprimer un son et une démarche. Même si l’approche de l’instrument est radicalement différente, Noullet proposant un éloge à la lenteur et au souffle quand Abdou évoquait une mécanique subtile, il y a dans la quête de l’intime et de la révélation -à soi-même, aux auditeurs- des similarités frappantes. Ce n’est pas étranger si à la fin de l’été, Mats Gustafsson les a toutes les deux invitées au sein du Fire Orchestra ! à l’occasion du dernier Summer Bummer

« Spirit of Gratitude » est sans doute le symbole de cette recherche opiniâtre. Passée au soprano quand le reste de l’album est à l’alto, Ornella Noulet se ceint de cloches et de sonnailles comme pour s’entourer de mystère, voire d’une certaine mystique. C’est tout le sujet d’un album qui préfère l’immatériel au matériel, à l’image de cette boucle lente et inexorable dont l’alto se saisit sur « Faithfullness » et qui paraît s’incarner davantage, prendre place et corps à la manière des maîtres soufis au milieu d’une transe. C’est dans « Truth is Mistery » que la saxophoniste va au plus profond de son propos, donnant à son jeu des reflets ayleriens dans ces notes tenues, puissantes et claires qui sonde les âmes. C’est une référence assumée, qui ressurgit dans « The Old Promise », morceau chaleureux qui semble de jamais vouloir toucher terre et se laisser porter par le courant.

Ornella Noulet n’a pas qu’Ayler comme référence, Coltrane a aussi son importance dans son esthétique (son quintet s’appelle Ola Tunji, référence directe) comme dans sa volonté de transcender le réel pour lui donner d’autres dimensions. On notera également les regards tournés vers la Scandinavie par cette liberté qui éclaire un solo d’une grande maturité qui donne envie de voir cette discographie s’étoffer aux côtés de ses pairs. Une très belle première pierre.