Plus habitué à jouer pour les autres, notamment dans le Pilgrim de Christoph Irniger, ou dans un trio qui existe depuis de nombreuses années, le pianiste suisse Stefan Aeby nous propose pour la première fois un exercice soliste. Pilier du label Intakt Records, il nous fait assister ici à une véritable prise de risque : atmosphères oniriques, parfois très troublantes (notamment la boucle lointaine de « Yume » et « Yoru » aux extrémités de l’album), économie de notes et de gestes malgré des sons altérés (« Dings »). On est loin de la joliesse et de la percussivité coutumières du jeu d’Aeby, même si on les retrouve dans des pièces plus classiques tel « Or Not » ou « Subway Run » qui lui fait suite. Cet exercice donne au pianiste une dimension supplémentaire, qui s’intéresse à l’immatériel et à l’intangible, comme ce « Tempus Fugit » qui passe comme un souffle.