Derby Derby

Cette plage unique du trio nantais Derby Derby tient de la traversée d’un plan par une droite oblique. Échafaudant une structure pleine qui avance sans cesse tout en donnant la sensation contradictoire d’être immobile, le trio fait tenir debout une verticalité harmonique qui ne progresse pas par enchaînement d’accords mais s’enrichit au fur et à mesure d’une multitude de détails infimes qui griffent la colonne de son dans un processus ondulatoire.

S’entrelaçant autour d’une solide ligne de basse (tenue par Sylvain Didou), la batterie dépouillée de Fabrice L’Houtellier multiplie les cellules rythmiques qui s’emboîtent les unes dans les autres dans un flux qui, bien que droit, privilégie la poly-vitesse et les impressions d’accélération/ralentissement. Au-dessus ou dedans, la trompette d’Alan Regardin, détimbrée par les pédales d’effet, évoque un liquide dont la luminescence provoque une fascination hypnotique et plonge l’auditeur dans un étrange bien-être.

Une fois atteint le climax de cette première période, la tension accumulée est alors libérée avec une énergie que la dilution du temps d’abord opérée permet de rendre immédiatement efficace. Tout en maintenant une continuité dans le traitement jusqu’à l’affaissement de la matière, Derby Derby invite l’auditeur à une transe dans laquelle l’opposition tension/détente se résout au bénéfice de la danse.