Chronique

Laurent Coulondre

Michel On My Mind

Laurent Coulondre (p), Jérémy Bruyère (b), André Ceccarelli (dm)

Label / Distribution : New World Records

Alors que l’on commémore les vingt ans du décès de Michel Petrucciani, le pianiste-claviériste Laurent Coulondre se saisit du répertoire de son prédécesseur légendaire dans l’intention de lui rendre un hommage ravageur. Il réussit, avec un trio réunissant son compère bassiste Jérémy Bruyère et le vénérable André Ceccarelli à la batterie, à esquiver les écueils de l’héritage convenu.

Nanti d’un profond respect pour l’œuvre de l’icône du piano jazz moderne, il s’émancipe des codes pianistiques du Grand Michel grâce notamment à sa maîtrise plus que parfaite de la tradition. Une citation de « Take The A Train » de Duke Ellington (et non pas de « Caravan » comme l’ont écrit certains dans d’autres colonnes) au détour de « She Did it Again » en est la preuve la plus flagrante. De même les deux compositions proposées, dont les harmonies subtiles relèvent d’une transcendance poétique assumée.

Surtout, Coulondre joue avec le temps : bien qu’il puisse se lancer dans des instants d’une vélocité assumée, il égrène aussi tranquillement des phrases emplies de silences bienvenus, confinant à une évanescence onirique. Sans négliger un sens de la danse qui aurait convenu à Petrucciani : lorsqu’il joue simultanément du piano et de l’orgue (rappelant les duos du prédécesseur avec Eddy Louiss), notamment sur le tubesque « Looking Up », qui fait ici l’objet d’un arrangement subtil, on est saisi d’un irrémédiable besoin de bouger l’ensemble de son corps.

Évidemment, la section rythmique n’est pas pour rien dans ce sens du groove : Ceccarelli développe un jeu incandescent, pendant que Bruyère, tantôt à la basse électrique, tantôt à la contrebasse (solo d’une rare conviction en introduction de « Rachid »), oscille entre douceur et puissance.