Scènes

Tigran Hamasyan : un jeune homme en fleur au Parc Floral

Dans le cadre du Paris Jazz Festival au Parc Floral de Vincennes, concert en trio du jeune prodige arménien du piano, Tigran Hamasyan.


Tigran Hamasyan : piano, claviers
Matthias Allamane : contrebasse
Matthieu Chazarenc : batterie

Paris Jazz Festival. Parc Floral de Vincennes. Dimanche 24 juin 2007.

Pour la mise en bouche, une fanfare vient chauffer le public avec haut parleurs, saxophone, trompette, trombone, hélicon, banjo, percussions.

Puis Tigran décolle. Il est léger, fluide. Le flux de son imagination nous entraîne. Un solo de contrebasse survolé par le piano et stimulé par la batterie, une série de breaks de batterie… La musique est à la fois aérienne et charpentée. S’ensuit une ballade composition, Come With The Wind. Le vent l’accompagne en faisant onduler les arbres autour de la scène. Tigran se met à ensorceler le piano, y ajoutant la splendeur orientale de l’Arménie, le toucher impressionniste français, le sens de l’espace de l’école russe. Le soleil sort des nuages, les oiseaux passent derrière la scène et chantent pour saluer le solo. Tigran entre dans le piano, le creuse, en tire la quintessence. Il travaille les graves, allège la pâte sonore avec quelques notes aigues puis adoucit le tout en ruisselet.

Après nous avoir envoûtés au pianoforte, Tigran se lance sur le clavier électrique avec un son très mouillé, sur un groove lent. Puis il s’amuse à produire un son d’orgue Hammond décalé. Il se prend pour Jimmy Smith sur un petit clavier ! Enfin, pour changer de style, une ballade romantique à souhait. Et toujours, chez lui, ce sens de l’espace, du grand air du Caucase. Les musiciens sont solides mais pas aussi créatifs que François Moutin et Ari Hoenig, les accompagnateurs habituels de Tigran. Ca « décolle’ moins que lors d’une mémorable soirée au Duc des Lombards en décembre 2005, où de nombreux pianistes étaient venus prendre des leçons d’un garçon de 18 ans. Pour finir, »Straight No Chaser", de Thelonious Monk pris sur un tempo très rapide au piano. Ça tricote ferme mais le trio revient bientôt à un rythme plus lent qui permet au public de battre la mesure, et conclut sur un tempo rapide.

Tigran Hamasyan n’a que 20 ans et c’est peu dire qu’il est doué puisqu’il a reçu en 2006 le Thelonious Monk Price des mains de Monsieur Herbie Hancock lui même. Mais lors de ce concert au Parc Floral, avec des accompagnateurs moins stimulants, il s’est parfois laissé aller à la facilité. Plus fâcheux, il n’a pas construit de discours musical enchaînant les morceaux au gré de sa fantaisie, sans couleur ni thématique dominante. Mais, rappelons-le, il est très jeune, très doué ; s’il canalise son énergie et sa virtuosité au service d’un véritable projet musical, il peut mettre le monde à ses pieds.