Chronique

Alexandra Lehmler & Franck Tortiller

Aerial

Alexandra Lehmler (ss), Franck Tortiller (vib)

Label / Distribution : Label MCO

On se souvient du duo entre Franck Tortiller et le guitariste Misja Fitzgerald-Michel lors du premier confinement ; la relation duale est une forme qui sied bien au vibraphoniste, dont la douceur et l’élégance, tout comme le sens de la mélodie, permettent toutes les libertés. En proposant un nouveau duo avec la saxophoniste allemande Alexandra Lehmler, toutes les conditions étaient réunies pour que l’échange éclairé aille chercher dans les émotions simples et directes. « Les Longues Patiences », court morceau emblématique de la couleur retenue, dit tout en quelques instants : le soprano attrape quelques mélodies que les mailloches soulignent, on retrouve cette ambiance de soirs d’été languides où tout est possible, même le spleen le plus doux ; le temps continue et « Ces petits riens » de Gainsbourg enchaîne avec la même douceur. Légèreté aérienne pour un bien nommé Aerial.

Lehmler et Tortiller avaient enregistré Sans Mots en 2017, avec un quartet où l’on retrouvait Matthias Debus, contrebassiste qui travaille de longue date avec la musicienne allemande. Ce disque est à redécouvrir, tant le vibraphoniste et la saxophoniste ont une proximité évidente. La culture classique est évidemment omniprésente : elle sourd de tous les échanges. Dès « N° 1 », écrit par Lehmler, les influences de la musique écrite occidentale affleurent, ce qui se confirme plus loin dans un « Enchaîne-moi » inspiré par Rameau où le vibraphone se fait tournoyant. Mais c’est bien avec « Mi Chiamano Mimi », œuvre de Puccini arrangée par Tortiller, que le duo jette les bases d’une culture commune, sans lyrisme inutile.

Aerial est avant tout un éloge de la simplicité. Le jeu sobre mais pénétrant des instrumentistes laisse l’imagination au travail. La douceur de l’échange et sa tendre poésie, qui sait se montrer gentiment turbulente dans « L’Innocence du cliché » où le saxophone laisse entendre que le ton pourrait durcir, ne peut que séduire. C’est d’autant plus vrai que la durée des morceaux, au format chanson, permet d’offrir une vision kaléidoscopique de cette très plaisante rencontre.