Chronique

C’mon Tigre

Scenario

Xenia Rubinos (voc), Mick Jenkins (voc), Colin Stetson (s).

Label / Distribution : Modulor Records

50 secondes. L’album ouvre ses volets sur 50 secondes d’une ambiance traditionnelle touareg, gnawi.

50 secondes qui laissent place à une guitare frontale, squelette sur lequel la matrice prend forme, instrument par instrument, piste par piste, jusqu’à l’obtention d’un mix à l’architecture moderne et électronique.

Le ton est donné : le duo italien de Bologne, devenu collectif, va continuer à nous surprendre, en tentant de syncoper tout ce qu’il peut. Il y a matière. Rythmiquement déjà, le pied posé en Afrique dès ces fameuses premières secondes ne nous trahira pas : le chemin tracé le long de ce Scenario sera poly. Mesures asymétriques portées par des cuivres entêtants, des Rhodes ravageurs, des voix très travaillées (ambiance très appréciée sur le titre The River) et une production à la hauteur de l’ambition. Une production qui flirte parfois avec ce que les Londoniens de Sault nous donnent de meilleur – on pense particulièrement au fabuleux titre Wildfires. Une diversité d’ambiances, de styles musicaux, mais une grande cohérence dans l’engagement, sans faille, dans le message que l’on pressent politique. Les partis pris sont assumés, radicaux, et la connexion se fait sur une sensibilité proche d’une musique du monde qui ne demanderait son avis à personne.

D’ailleurs, Xenia Rubinos et Mick Jenkis, tous deux américains, accompagnent ce Scenario providentiel jusqu’au titre final Sleeping Beauties, manifeste électro cuivré accompagné cette fois du saxophoniste Colin Stetson dont on ne se lasse pas de suivre l’actualité.
De quoi refermer les volets de cet album avec un enthousiasme débordant pour ce collectif auquel on prédit un avenir passionnant, parsemé – on l’espère – de nombreux invités prestigieux.
Et même si on ne sait toujours pas comment prononcer son nom.
Même pas peur.