Chronique

James Carter

Heaven To Earth - live at the Blue Note

James Carter (ss, ts, sax baryton), John Medeski (Hammond B-3), Adam Rogers (g), Christian Mc Bride (b), Joey Baron (dm)

Label / Distribution : Half Note Records

Que n’a-t-on entendu et lu lors de la sortie de ses premiers albums en 1994/95 (J.C. On the Set et Jurassic Classics) : égocentrisme, arrogance, exhibitionniste, j’en passe et du moins bon au meilleur : « obsédé saxuel, pantagruélisme saxique » (M. Contat), « musicien post-modern s’accordant sans états d’âme le droit de renouer avec le passé voulant en finir avec la tyrannie de l’innovation » (J.-L.Chautemps)… Bref, on n’allait tout de même pas lui reprocher une éblouissante virtuosité et le nomadisme assumé de son jeu… ? Et bien si ! il y a encore et toujours des détracteurs.

L’année de ses 40 printemps, ce natif de Detroit (Michigan) admirateur fou de Django Reinhardt (dont il connaît tout et à qui il ne manque jamais de rendre hommage), dix albums sous son nom, réunit quelques amis au légendaire Blue Note de New York, résultat : ce disque dé/montre que le beau James n’a rien perdu de cette technique qui en laisse plus d’un pantois, ni d’un style maintenant plus maîtrisé - tout en se laissant aller à ces péchés mignons qui agacent et/ou ravissent -, pas plus que de sa superbe bien chevillée aux saxes, dont il sort sonorités et phrases (ou bribes) inouïes…

À preuve le premier morceau de choix : « Diminishing », groovy/funky, torride, ouvre une soirée pendant laquelle ses partenaires lui donneront une réplique à sa dé/mesure : l’orgue inventivement déménageur de John Medeski, la guitare patchwork d’Adams Rogers (qui va jusqu’à évoquer franchement BB King dans un blues ras-les-socquettes, le « Blue Leo » de ses confrères saxophonistes Leo Parker et Ike Quebec), plus une rythmique de rêve toujours à l’affût, un programme éclectique (fortement ancré dans l’esprit du rhythm’n blues et de la soul fiévreuse) dont un titre de Lucky Thomson (« Slam’s Mishap »), un autre de Larry Young (Heaven on Earth), la langoureuse ballade « Street of Dreams »… un public réceptif… Tout cela donne un disque pour le fun à haute dose qui fait bouger la tête, les pieds et même le reste. On ne saurait s’en priver.