Chronique

Olivier Lété

Ostrakinda

Olivier Lété (elb), Aymeric Avice (tp, bugle), Toma Gouband (dms, perc).

Label / Distribution : Jazzdor Series

Olivier Lété est un musicien pluriel, aux multiples influences. Bassiste branché et amateur de décibels, il multiplie depuis plus de quinze ans les projets aux frontières d’esthétiques différentes, mais finalement complémentaires, qui dessinent en creux le portrait d’un musicien généreux et audacieux. Passé par l’ONJ de Claude Barthélemy (deuxième mouture, mandat 2002/2005) et le collectif Slang, il participa au trio Le Maigre Feu de la Nonne en Hiver (avec le regretté Éric Groleau et Philippe Lemoine), au quintet Lost On The Way de Louis Sclavis et joue aujourd’hui dans le trio Parking d’Élise Dabrowski et sur les albums de la chanteuse Marjolaine Reymond.

Dès 2017 et son album solo Tuning, notre chroniqueur Olivier Acosta avait repéré l’énergumène : « On ressent à l’écoute de ces pièces sombres et souvent minimales que l’exploration du son, le jeu avec le son, est un point de départ d’incursions dans un imaginaire personnel. Mais cela n’aboutit pas à un résultat froid dont l’auditeur est exclu. Naissent au contraire de cette démarche introspective une série de compositions qui, pour peu qu’on s’y abîme, se révèlent fascinantes ». Ces lignes pourraient décrire aujourd’hui le sentiment que l’on éprouve à l’écoute d’Ostrakinda, le nouvel album du bassiste en trio, avec le batteur/percussionniste Toma Gouband et le trompettiste Aymeric Avice (complice de longue date notamment dans le projet ION, encore avec le saxophoniste Philippe Lemoine).
La musique y irradie, souterraine, rampante, comme sortie des entrailles de l’univers. Elle s’immisce en vous, colonise votre être, se ramifie, presque vénéneuse. Sonorités sourdes, profondes, terriennes. Du fond des âges, elle invoque l’esprit des premiers musiciens. Âge de faire. La basse est épaisse et volubile ; la trompette (ou le bugle à l’occasion) raconte des histoires séculaires, bouche à oreille antique ; la batterie percute et ponctue, décidée, enthousiaste. Boyau, corne et peau, instruments premiers. Trio ancestral, animal. L’osmose est totale. Magistral.

Le disque est issu de plusieurs concerts enregistrés entre 2019 et 2022. La plupart des compositions sont d’Olivier Lété. Il est la quinzième référence de la collection Jazzdor Series, qui, soit dit en passant, ne déçoit jamais.

par Julien Aunos // Publié le 25 juin 2023
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