Teodross Avery

Esprit de Monk es-tu là ? Le saxophoniste quasi quinqua Teodross Avery s’empare du répertoire inusable du grand prêtre du bebop avec deux formations captées live dans un chaudron harlémite. L’une, plutôt hard-bop, rappelle la saveur dansante de l’étrange swing monkien. L’autre, plus ouverte aux improvisations, résonne de la richesse harmonique du patrimoine « monacal » (mention spéciale au batteur de cette seconde session, Marvin « Bugalu » Smith, le bien nommé). Il y a de la part du leader une propension à l’étude des soufflants qui accompagnèrent le génial créateur, entre le mordant de Johnny Griffin, la grâce de Sonny Rollins et la spiritualité d’un Coltrane, ou encore les accents free d’un Steve Lacy (le dernier disciple du Moine) lorsqu’il s’empare du soprano.
Pour autant, Mr Avery est bien de son époque : ses incursions précédentes dans les univers soul et hip-hop (on a pu l’entendre aux côtés d’Amy Winehouse ou bien de Talib Kweli) lui permettent de garder le cap d’une musique populaire, fut-elle présumée savante. Accompagné par une jeune garde en joie (le contrebassiste Corcoran Holt notamment, repéré entre autres aux côtés d’un Jeremy Pelt), il livre une version décapante de « In Walked Bud » et restitue à « Ugly Beauty » sa singulière magnificence.