XOL

Il y a une part de mystère, dans le titre XOL plays X.en, qui ne se résout pas. On a beau chercher, du suspendu « To Receive an Image », qui s’articule autour d’un profond jeu d’archet du contrebassiste Luca Pissavini à la rigueur inchangée jusqu’à « Are Reflected in One » où la batterie de Francesco Micolis fouraille pour dénicher une piste stable et carrossable pour les soufflants, on peine à trouver un sens à ce X.en. Il n’y en a peut-être pas, et c’est pour cela qu’on s’obstine à déchiffrer une langue qui s’invente à mesure que les improvisateurs s’élancent. C’est ce qui donne à cet album un aspect obsessionnel et plein de tensions. Et tant pis si, mis bout à bout, les titres de cet album forment des aphorismes Zen ; la rage de la trompette de Guy Bettini et le feu follet de du saxophone soprano lacyen du Finlandais Harri Sjöström auront tôt fait de nous agiter jusqu’à nous faire oublier toute retenue.

Pourtant, dans l’inaugural « Still Water Has No Mind » il y a, sous-tendu par le flot nerveux des deux soufflants remarquables d’inventivité, tout un rituel et une réflexion profonde de la base rythmique. Notamment Micolis qui frappe ses tambours avec parcimonie et fait chanter ses cymbales de manière très introspective, comme s’il s’agissait d’équilibrer le chaos de Bettini et Sjöström. C’est prégnant dans le central « The Whole Moon », où la contrebasse fait claquer sèchement ses cordes sur le bois pendant que la batterie choisit ses frappes avec une grande attention qui n’oblitère pas la virulence. Dans ce long morceau qui fonctionne comme une suite de flux et de reflux permanents, on a le sentiment que le quartet déconstruit l’idée du Yin et du Yang, grâce à un équilibre nouveau, qui s’impose avec cette formule.

C’est Improvising Beings qui nous avait fait découvrir les italophones en trio. Si depuis on a eu le plaisir de réentendre Guy Bettini avec Gerry Hemingway, c’était une découverte, et les invités de Exit to Now avaient permis de mettre en valeur une vraie énergie free. Brötzmann est reparti, mais Sjöström s’est installé dans XOL et l’orchestre y a gagné en stabilité. Si trompette et saxophone semblent jouer à fleuret moucheté, c’est davantage l’excitation du jeu qu’une quelconque animosité. Au contraire, dans « Drewdrop on the Grass », on découvre une facette presque facétieuse dans les sinuosités de Sjöström, bien soutenu par les grognements de la trompette. XOL plays X.en est un disque cohérent et intense qui ravira les amateurs d’un free insolent mais très collectif. Un plaisir.