Chronique

Edouard Ferlet

L’Écharpe d’Iris

Edouard Ferlet (p), Simon Späng-Hanssen (s, fl), Xavier Desandre-Navarre (perc), Alain Grange (cello)

Label / Distribution : Melisse

Parlant d’Édouard Ferlet, le chroniqueur a souvent tendance à aligner les épithètes. Nous en avons compté jusqu’à trente et un dans un article de 1 700 signes consacré par un confrère à l’Écharpe d’Iris.

Il est vrai que la polychromie de l’album y incite. L’Écharpe d’Iris, c’est bien sûr l’arc-en-ciel, au choix : réfraction du soleil sur les gouttes de pluie ou bien foulard flottant au vent dans le sillage de la messagère des Dieux, fille d’Électre et soeur des Harpies (on choisit ses amis… )

Ce disque a tout du kaléidoscope : les couleurs bougent, se superposent, se brisent et reviennent en place, on est porté, un peu ébloui par tant de mouvance, on cligne de l’oreille pour mieux entendre. A propos d’Édouard Ferlet, le mot « légèreté » revient souvent ; il faudrait aussi parler de délicatesse et d’un certain sentiment d’allégresse mutine.

Des compositions en apesanteur (la première partie de Par-dessus tout, Harmonix, Roue libre) voisinent avec des rythmiques affirmées sans outrance (la seconde partie de Par-dessus tout, Le Furet) ; les autres membres du quartet cherchent des traverses vers le Nordeste (Dreamwise), l’Espagne (Andalucia’s Dream), l’Orient (Xamonide). L’ensemble, pourtant, fleure bon l’Europe et le climat tempéré, un bonheur tranquille qui s’en va trouver la marmite d’or au bout de l’arc-en-ciel avec la comptine finale de Petite fille, qui vous fait entrevoir l’art d’être père, tout simplement.

Composé d’un vieux compagnon de route, Simon Späng-Hanssen aux saxophones et à la flûte, et de deux acolytes plus récents, le batteur-percussionniste Xavier Desandre-Navarre et le violoncelliste Alain Grange, le quartet a, sous le nom de Straight Flush, tourné beaucoup en 2006-2007.

Édouard Ferlet se paie le luxe de revisiter complètement deux de ses compositions déjà présentes sur des albums précédents (Faire les doigts raides, Roue libre) et nous gratifie ici d’orchestrations au petit point, laissant la part belle aux qualités des instrumentistes (et aux siennes !). La maîtrise de la palette sonore du quartet (le choix des couleurs de percussions, le jeu sur les sonorités des anches et de la flûte, le violoncelle qui se fait ici guitare, là contrebasse), les clins d’oeil sonores (bruits de pas, de vélo) et la pertinence des interventions improvisées font le reste.

Cette musique a la beauté fugace d’un rayon de soleil après la pluie. Écoutez…