Chronique

Yves Robert Trio

Inspirine

Yves Robert (tb), Cyril Atef (dms), Vincent Courtois (cello), Bruno Chevillon (b)

Après un prophétique L’Argent, retour au trio de La Tendresse [1] pour Yves Robert. Enfin presque : cette fois, le trio est à géométrie variable : Vincent Courtois et Bruno Chevillon, respectivement au violoncelle et à la contrebasse, se relaient suivant les morceaux.

Ce trio original, c’est avant tout la voix - les voix - d’Yves Robert. Qu’il se fasse majestueux comme sur « Spirituel frisson » ou rythmique à la fin de « Pas normal, c’est norbien », son immense palette au trombone est toujours utilisée au plus juste. Alliée à cette richesse de registres, l’alternance du violoncelle et de la contrebasse permet de surprenantes variations de textures et assure une réelle diversité de climats. Ainsi retrouve-t-on la tendresse sur « Spirituel frisson », où le violoncelle en pizzicati accompagne un trombone avec sourdine tout simplement bouleversant. Tendresse encore sur « Plus de caféine » : le violoncelle en écho aux percussions minimalistes donne la chair de poule… Mais l’ambiance peut aussi se faire plus rock (« Wadda U Want »).

Mais la couleur particulière de ce trio c’est aussi le jeu de Cyril Atef - plus percussionniste que batteur -, entre Afrique, Antilles et « drum’n bass » ; [2]. Sur « Signe intérieur de richesse », il installe un véritable tapis de jeu rythmique où Courtois et Robert s’amusent comme des enfants terribles. Ce dernier a voulu une batterie au centre pour une musique plus rythmique ; c’est particulièrement réussi sur « Between the Bliss and Me » [3] où elle chaloupe comme rarement. Quant à l’assise et la précision de Chevillon, elle renvoie aux meilleurs moments du trio : Des satellites avec des traces de plumes, enregistré avec Aaron Scott en 1989.

Ce disque s’inscrit donc de façon très cohérente dans le parcours d’Yves Robert, pour qui la question de la durée a toujours été une préoccupation artistique et un moteur de création - en témoignent ses morceaux courts (autour de 3 mn), comme sur Tout court (1991), et/ou agencés en suite comme sur Tout de suite (1994).

Que l’on suive l’artiste depuis longtemps ou que l’on découvre son travail ici, cette musique gaie, folle, follement gaie, qui ne se prend sérieusement pas au sérieux [4] saura convaincre.

par // Publié le 22 décembre 2008

[1In Touch publié chez ECM en 2002

[2On a parfois dans l’oreille Bumcello, son duo avec Vincent Segal (violoncelliste, tout se tient !)

[3thème écrit par Courtois

[4Écoutez donc l’hilarant « Ni dieu ni applaudimètre » final, où un choeur masculin (Atef et Courtois ?) répond aux phrases du tromboniste.