Chronique

Maria Faust Sacrum Facere

Organ

Emanuele Maniscalo (org), Ulla Krigul (org), Maria Faust (as), Ned Fer (ts), Francesco Bigoni (clar), Tobias Wiklund (tr), Mads Hyhne (trb), Jonatan Ahlbom (tub).

Label / Distribution : Stunt Records

Après le succès de son dernier disque, Maria Faust nous présente aujourd’hui la suite de son projet d’expérimentation musicale nommé Organ. Faisant partie de ces musiciens et compositeurs catalogués « jazz » car inclassables, cette exploratrice musicale utilise sa connaissance des musiques classiques et improvisées pour tenter de dépasser les frontières de la création musicale.

Ce nouvel album de compositions pour orgue d’église et instruments à vent est principalement interprété par son groupe Maria Faust Sacrum Facere. La compositrice d’origine estonienne semble s’intéresser aux similitudes et différences ; musicales ainsi que culturelles, de l’orgue et du saxophone. Son souci du détail est présent jusque dans l’orgue choisi pour enregistrer cet album, puisqu’elle utilise celui de l’église St Nicholas à Tallinn. Une église qui a traversé les siècles : datant du Moyen âge, elle incarne la dureté de l’Histoire estonienne. C’est un lieu de mémoire dont l’orgue est reconnu pour son timbre et son son par de nombreux organistes, à l’instar d’Arvo Pärt.
Le concept de mémoire semble traverser l’ensemble des créations musicales de Faust, puisqu’après l’exploration de la mémoire folklorique collective dans Maria Faust Sacrum Facere, la mémoire du traumatisme collectif dans In The Beginning, la mémoire physique de son environnement dans Maria Faust Machina, avec Organ elle s’intéresse à sa mémoire personnelle et invite l’auditeur à l’introspection.

En 2017 l’organiste Ulla Krigul demande à Faust de lui composer un morceau pour orgue et électronique. De cette commande naîtra « Strauma », qui sera retravaillé et divisé en trois parties pour figurer sur l’album. Il s’agit des seuls titres qui ne seront pas interprétés par l’organiste italien Emanuel Maniscalo. L’orgue tient une place centrale dans les compositions, tantôt en premier plan, tantôt se cachant derrière les vents ou l’improvisation d’un saxophone comme dans « Hold ». Le seul morceau faisant exception étant « Nin » qui est un solo de saxophone interprété par Faust. La collaboration entre ces instruments semble évidente tant les morceaux sont méticuleusement composés, produisant une spatialité, une étendue, un paysage sonore à la fois minimaliste et vertigineux ; entre ciel et terre.

Dans Organ Maria Faust joue avec le sacré et l’extrasensoriel ; laissant l’imagination de l’auditeur parcourir son palais mental afin d’y retrouver des souvenirs et sensations oubliées.