Chronique

Oberg, Thewes, Griener

Lacy Pool

Uwe Oberg (p), Christof Thewes (tb), Michael Griener (dm)

Label / Distribution : Hatology / Harmonia Mundi

La modernité de Steve Lacy en faisait aussi un grand relecteur de thèmes et de standards. Sa formidable capacité d’invention et son intelligence du saxophone passaient par ces exercices de réappropriation. C’est donc tout naturellement que des hommages paraissent à intervalles réguliers afin de saluer ce travail de défrichage. Lacy Pool s’inscrit dans cette lignée, mais revisite les compositions de Lacy via un line-up inhabituel : un trio piano, trombone et batterie. De quoi revisiter à neuf les thèmes originaux, ne serait-ce que par les glissandi qu’offre le trombone par rapport au saxophone, et dont Christof Thewes fait ici un usage réjouissant.

Le trio est mené par Uwe Oberg mais le pianiste laisse pourtant l’essentiel des thèmes à son comparse tromboniste : « The Crust », « The Whammies ! », « Flakes » ou « Raps » le mettent joliment en avant. Plus intéressantes encore sont les deux compositions originales, « After Hemline » et « Tarte », chacune incluant un thème fameux de Lacy : « Hemline » pour le premier, « Art » pour le second. Cette insertion « gigogne », cette greffe dans une pièce justement inspirée par elle tout en se permettant des écarts est très séduisante : le procédé propose un petit jeu de citation stimulant pour l’oreille qui cherche à comprendre la réinterprétation, l’intégration du thème dans le morceau nouveau, et sa façon d’en travailler l’écriture. C’est aussi et surtout un geste théorique marqué, qui montre bien à quel point les musiciens se sont intimement réapproprié Lacy. Laissons ainsi le dernier mot à Art Lange, qui signe les notes de pochette : « The song may have inspired the players, but the players have become the song. » On ne saurait mieux dire.