Chronique

Suzanne

Travel Blind

Maëlle Desbrosses (vla), Hélène Duret (clb), Pierre Tereygeol (g) + Émile Parisien (ss).

Label / Distribution : Gigantonium

Lauréate de Jazz Migration pour la saison 2022, la formation Suzanne avait, sur scène, su attirer l’attention par des compositions travaillées qu’une interprétation sans faille mettait en valeur. Fort de cette expérience accumulée, le passage au disque s’est fait naturellement pour une douzaine de titres qui approfondissent ce qui est désormais la couleur du trio : une écriture soignée et classique, celle du guitariste Pierre Tereygeol, dans laquelle on entend un vocabulaire chambriste mettant en valeur une orchestration aboutie au service d’une narration toujours présente.

Ainsi l’alto de Maëlle Desbrosses et la clarinette basse d’Hélène Duret dessinent des paysages ouatés teintés d’une mélancolie en variation constante. L’intérêt que porte Tereygeol aux structures à tiroirs, et parfois au long cours, sont en effet le moyen de traverser des climats homogènes mais variés au sein desquels l’impétuosité peut surgir d’atmosphères plus mesurées.

Toujours, pourtant, le sens de la mélodie est privilégié, de même que le jeu sur le rythme qui le classe immanquablement du côté des musiques issues du jazz. Par leur manière aussi d’installer à des moments inattendus des décrochages toniques, se plaçant, de fait, dans une modernité stimulante.

Sur deux titres (et des interludes), le saxophone d’Émile Parisien vient compléter le trio de son lyrisme lumineux et se glisse avec aisance dans son esthétique. Cette musique habitant un monde délicieusement désuet aux fulgurances modernes en fait une formation habitée à suivre absolument. 

par Nicolas Dourlhès // Publié le 7 janvier 2024
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