Chronique

Various Artists

Blue Note Records

Label / Distribution : Blue Note

Soixante ans de Blue Note à travers une compilation de quarante titres

Certes, il ne s’agit que d’un survol, mais en trois CD, 40 thèmes-phares et autant de musiciens, on comprend mieux la place qu’occupe cette maison de disques dans le jazz de ces soixante dernières années

Cette compilation va à l’essentiel : elle survole en 3 CD la riche histoire du label, des origines jusqu’à Terence Blanchard, qui ferme la marche avec Dear Mom. Du coup, elle présente en accéléré, en accordant à chacun un morceau et un seul, les plus grands artistes passés par la maison, fondée par Alfred Lion et Francis Wolff. L’ordre choisi est à peu près chronologique.

On démarre donc avec Albert Ammons (« Boogie Woogie Stump ») qui fut en effet le tout premier à enregistrer pour le label à la fin de 1938. A partir de là, tout s’enchaîne : Sydney Bechet enregistre en juin suivant. Puis ce sont successivement Monk (« Criss Cross ») - qu’Alfred Lion tint à publier malgré son insuccès de départ - Miles Davis, Sonny Rollins, Johnny Griffin, Coltrane, Jimmy Smith… Chaque fois, c’est un des thèmes les plus connus de l’artiste qui a été retenu ici. On passe ainsi du « Moanin’ » d’Art Blakey au « Cheese Cake » de Dexter Gordon, de la « Blue Bossa » de Joe Henderson à « Cantaloupe Island » d’Herbie Hancock, au « Sidewinder » de Lee Morgan, etc. La liste est longue : la compilation, qui se veut exhaustive, rassemble des pièces enregistrés sur plus de soixante ans. Même si on ne connaît pas les titres, on identifie à coup sûr les premières mesures ; on comprend mieux alors l’influence de Blue Note dans la constitution de la culture jazz contemporaine.

Pour finir, le coffret cite les « petit(e)s nouveaux/velles » du label : Stanley Jordan, Michel Petrucciani, Norah Jones, Cassandra Wilson, Patricia Barber, Rubalcaba, Eliane Elias mais aussi US3 et ce Cantaloop si particulier que la maison a tenu à publier. Un seul musicien deux fois cité : Grant Green, qui a fait ses premiers pas assez discrètement chez Blue Note avant d’en devenir le guitariste maison.

On le sait, ces compilations ne sont pas exemptes de défauts et d’injustices. Ici, il manque beaucoup de monde à l’appel - au hasard : Earl Hines, Clifford Brown ou Ornette Coleman. Et si ce condensé met l’eau à la bouche, il est un peu comme un hélicoptère qui déposerait ses touristes quelques secondes sur les plus beaux sommets alpins en négligeant la beauté des vallées environnantes… sans lesquelles ils ne seraient rien. En revanche, voici traitée et restituée vaille que vaille, et pour un prix modique, cette aventure singulière du jazz contemporain initiée par deux Berlinois. Pour en savoir plus, se reporter au célèbre catalogue Blue Note. De toutes façons, le temps joue pour lui.