Chronique

Daniel Humair

Baby Boom

Daniel Humair (d), Matthieu Donarier (ss, ts), Christophe Monniot (ss, as, bs, effets), Manu Codjia (g), Sébastien Boisseau (b)

Label / Distribution : Sketch Records

Quelle mouche a bien pu piquer notre cher batteur helvéto-parisien ? Pas la Tsé-Tsé en tout cas, car depuis quelque temps, il est pris d’une singulière boulimie d’enregistrement ! C’est peut-être pour rattraper le temps perdu, puisqu’il a finalement peu enregistré en leader. En tout cas il a trouvé chez Sketch, des partenaires en qui il place toute sa confiance et qui lui laissent toute latitude pour exploiter ses envies créatrices. Tant mieux.

Voici donc le troisième disque paraissant cette année, celui de son véritable groupe actuel (après deux projets un peu particuliers) avec lequel il a beaucoup tourné, un peu partout en France.
Les baby-boomers, qui pourraient être ses petits-fils, sont ses élèves de la classe de Jazz du Conservatoire de Paris (hormis Sébastien Boisseau), ses chouchous, et on sait qu’en la matière, Humair manque rarement de flair.
Pour recourir à une métaphore culinaire qui fera plaisir au batteur-chef, il faut dire qu’à force de concerts, ce groupe est passé maître dans l’art de faire monter la mayonnaise ou le soufflé sans que celui ci s’écroule (avec, en ce qui me concerne, un point d’orgue inoubliable : le concert du Parc Floral en 2002). Cela veut aussi dire que sur scène, tout est permis, et que le thème est prétexte à jouer. Ou encore qu’il faut du temps pour développer, et que les morceaux prennent l’allure de longues suites.

Ici, le travail est resserré, voire apaisé. Parfois même inquiétant et un tantinet austère (Wanbli, Drama Drome). Il y a un peu plus de cadrage, et même un respect plus affiché envers la tradition (et pour Daniel Humair, c’est important).
On y perçoit cependant la fougue de la jeunesse chez le virevoltant Monniot (Blanc cassé, son blues écorché, ou La Bourrée des mariés, le morceau le plus déglingué du disque) et l’élégance du son bien rond et boisé de Boisseau qui fait contrepoint aux éclats bruitistes de Codjia (même s’il paie plutôt sa dette envers Abercrombie et Metheny).
C’est aussi dans Baby Boom que Matthieu Donarier s’est pleinement épanoui et y a cassé ce qu’il y avait de trop traditionnel en lui (on entend le résultat dans son brillant chorus sur Bois d’arbre, sans doute le meilleur morceau de l’album).

Après ce convaincant Baby Boom, on attend de pied ferme la prochaine production d’Humair !