Chronique

Fred Hersch > Trio et Solo

Sunday Night At The Vanguard & Solo

Fred Hersch (p), John Hébert (b), Eric McPherson (dm)

Label / Distribution : Palmetto Records

Deux disques dignes de la plus grande admiration. Mais par lequel commencer ? Question pédante ? Voire. Quoi qu’il en soit, je conseille le trio d’abord, ne serait-ce qu’à cause du premier morceau, qui est à lui seul (dans son titre) l’enseigne même du parcours de vie de Fred Hersch : « A Cockeyed Optimist ». Il lui aura fallu, en effet, une énorme dose de ce qu’Alain disait être « de volonté », quand son opposé est qualifié à juste titre « d’humeur ». Et puis il y a ce rappel en solo, qui vous introduit si bien au disque suivant : « Valentine ».

En vous reportant à l’entretien qui figure dans la présente livraison de Citizen Jazz, vous saisirez aussi ce qui fait le bonheur de ces sessions (toutes deux live). D’abord l’étonnante versatilité d’un pianiste que l’on pourrait croire plus ou moins confiné à l’intime, au confidentiel, voire aux versions « classiques » de ces choses, alors même qu’il profite de la moindre occasion pour bondir, sauter de joie, d’allégresse, parfois de rage, soutenu et relancé par deux partenaires aussi pertinents que complices. Mais ensuite, comment ne pas se réjouir (et se régaler) d’un toucher dont la palette de couleurs est aussi variée qu’il se peut, et sait s’adapter à chaque instant à ce qui se dit. Et enfin (last but not least) on entendra ici ou là la stricte application de ce qu’il déclare dans cet entretien, savoir une expérimentation constante, et cette incroyable façon d’accélérer le tempo, en infraction avec les règles qu’on imaginait immuables en ce domaine (« The Optimum Thing »).

Nous voilà donc quasiment sommés d’écouter Fred Hersch à nouveau. Au sens propre, d’une façon inouïe, mais aussi comme s’il s’agissait d’un instrumentiste, musicien, compositeur débarquant d’une autre planète. Voilà : vous cherchez de l’autre, il est là, au coeur même de ce que l’on s’imagine connu et identifié.