Chronique

Glawischnig - Oberleitner - Neto - Furlan

Sound Is

Dieter Glawischnig (p), Alípio Carvalho Neto (ts), Gal Furlan (dms)

Label / Distribution : Klopotec

Véritable acteur central du jazz autrichien, le pianiste Dieter Glawischnig a beaucoup travaillé en Allemagne, en grand orchestre comme avec Albert Mangelsdorff. Il n’en reste pas moins un homme de fidélité, comme celle qui le lie au contrebassiste Ewald Oberleitner, que l’on a entendu il y a peu avec Zlatko Kaučič au sein de Disorder at The Border. Vétérans de la scène viennoise, les deux hommes jouèrent ensemble dans Neighbours qui fit les beaux jours des années 80 et enregistra avec Braxton. On les retrouve ici en quartet avec le Slovène Gal Furnan à la batterie et le Brésilien Alipio Carvalho Neto au saxophone alto principalement ; on avait découvert ces derniers avec Kaučič en 2021, quelques mois à peine avant l’enregistrement de ce Sound Is qui célèbre une vision très européenne de la musique improvisée. Un paradigme franchement familial, donc.

Il y a sur le très fluide « Pattern » une accointance qui tient de l’habitude : le piano joue avec souplesse pour lancer une machine implacable où chacun est à sa place. Le jeu de Furnan est tout en tension, assez rugueux et entraîne avec lui une contrebasse puissante ; le saxophone de Neto est quant à lui une véritable matière inflammable, instable, mais qui sait prendre le temps avant de s’enflammer. C’est le cas dans « Temporality », où l’explosion semble inéluctable. Dans ce contexte, la fausse placidité de Glawischnig est le meilleur atout du quartet ; dans le plus long « Als Die Synagonen Brannten », son jeu, notamment main gauche, semble impassible mais gagne en puissance de mesure en mesure, surtout lorsque le pizzicato de la contrebasse se joint à lui.
 
Enregistré en Autriche en public, Sound Is est une belle démonstration de liberté entre des musiciens volontiers rugueux. Avec « Solidaritätslied Nr 2 », alors que le piano se fait plus lyrique, c’est la batterie de Gal Furnan qui porte une étincelle capable de mettre le feu aux poudres ; elle viendra du saxophone au timbre chaleureux qui prend le relais sans bousculade inutile. La grande synergie entre les musiciens est la clé d’un orchestre à l’aise sur tous les terrains, même les plus accidentés comme « Young Play » où Oberleitner montre tout son talent. Un témoignage précieux.