Chronique

Kongle trio

Live at Moldejazz

Liv Andrea Hauge (p), Øystein Skjelstad Østensen (b), Veslemøy Narvesen (dm, scie musicale)

Label / Distribution : Ora fonogram

Le jeune trio norvégien Kongle (pomme de pin) unit la pianiste Liv Andrea Hauge, le contrebassiste Øystein Skjelstad Østensen et la batteuse Veslemøy Narvesen. Depuis leur sélection pour les showcases d’Oslo Jazz festival 2019, où ils ont fait enfler la rumeur, l’ascension a été directe jusqu’au sommet. Malgré la pandémie et les deux années maudites qui ont suivi, le trio a touché juste, ne manquant jamais de convaincre à chaque concert. Un an et demi après sa création, il est élu meilleur « jeune » groupe jazz 2020/21 de Norvège.

Si révolutionner le sacro-saint trio piano-basse-batterie quand on a un peu plus de 20 ans relève de la gageure, on peut néanmoins en dépoussiérer l’approche avec une touche de magie et beaucoup de naturel. Nul besoin de maquillage : le charme de Kongle trio opère à nu. Chacun des musiciens a à cœur de livrer quelque chose de neuf. Comme s’il jouait pour chacun de nous sans chercher à plaire au plus grand nombre.

Tout d’abord, sur l’improvisation, le trio maîtrise les harmonies dénuées de snobisme. Cet art de trouver en peu de temps l’équilibre et d’y ajouter des mélodies efficaces est ici proche de la démonstration de maîtres. Par exemple, sur le titre « Lille Petter Etterpåklok », la narration part d’une dynamique simple à la contrebasse, complétée par une harmonie sans faille au piano. Liv Andrea Hauge a ingurgité Bobo Stenson et été biberonnée à Paul Bley et, de toute évidence, marche avec respect dans leurs pas. Ensuite, la technique infaillible de la batteuse poétesse (que nous mettions en Une en ce début d’année) « gonfle » le tout et l’émotion arrive. Pure. Désarmante. Comme dans un regard d’enfant, heureux d’écouter encore son histoire favorite (« Nattog Til Trondheim »).

Ensuite, ce qui fait qu’aucune des compositions - car il s’agit aussi d’écriture - n’est ennuyeuse, tient à l’espace qu’ils se laissent. Il est nécessaire pour de grands hors-pistes maîtrisés (« Klums På Sykkel », qui ouvre l’album). La belle musique n’est rien d’autre que cela. En outre, elle est exécutée avec sourire et cela se ressent. Le plaisir est toujours communicatif.

Voilà pourquoi Kongle trio est un excellent groupe live et pourquoi il est logique que leur premier album soit ce « Live In Molde », enregistré en 2020. Leurs ainés, Moskus, Maria Kannegaard Trio, les regardent et les saluent. Comme le public et les auditeurs de ce disque presque trop court, ils savent que la relève est déjà là, au Kongle du bonheur.

par Anne Yven // Publié le 19 mars 2023
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