Chronique

Pierre de Bethmann

Go

Pierre de Bethmann (p, Rhodes, org, synth), David El-Malek (ts), Vincent Artaud (b), Franck Agulhon (dms).

Label / Distribution : Aléa

Et voilà, c’est fini ! En attendant les prochaines aventures, bien évidemment. Avec la réédition de son album en quartet Go, Pierre de Bethmann a mis la dernière main à un travail de reconstitution de sa discographie en tant que leader sur son label Aléa. Soit une quinzaine d’albums en 20 ans, depuis Ilium version quintet en 2002 jusqu’au cinquième volume de ses Essais l’an passé, en passant par d’autres expériences comme le Medium Ensemble. L’œuvre du pianiste est imposante, et aura été largement évoquée dans les colonnes de Citizen Jazz. Quoi de plus normal après tout, quand on sait la capacité de ce musicien à développer un langage complexe qui, pour autant, ne perd jamais de vue le caractère essentiel du groove et de l’énergie et qui a toujours su accorder à ses partenaires tout l’espace nécessaire à l’épanouissement de leur jeu. L’univers de Pierre de Bethmann a de faux airs d’un laboratoire d’où finit toujours par sortir un jazz savant et en même temps porté par un enthousiasme communicatif.

Go (enregistré en 2011) ne fait pas exception à la règle et voit Pierre de Bethmann entouré de ses plus fidèles partenaires : David El-Malek, compagnon de toutes les aventures, irremplaçable saxophone ténor dont on connaît le caractère mystique et passionnel de l’engagement en musique [1] et qui sera d’ailleurs présent dans la prochaine mouture du quartet [2] ; Franck Agulhon, rythmicien mélodiste des peaux, qui aura été de la partie durant plus d’une dizaine d’années, modelant sa sonorité au plus près des intentions du leader ; Vincent Artaud, enfin, contrebassiste créateur pour lui-même (souvenons-nous du magnifique Music From Early Times en 2011) mais aussi pour bien d’autres auxquels il a prêté son imagination. Un quartet affûté pour un disque que nous évoquions ici même en des termes qu’on reproduira à l’identique, puisque la musique est la même et a conservé toute sa fraîcheur par-delà les années : « Go vous attrape par la manche et ne vous lâche pas, c’est là toute la magie de ses belles tourneries, comme de Bethmann aime lui-même les définir. Une pièce de plus dans le puzzle enchanté que le pianiste, en vrai scientifique qu’il est, compose avec méthode depuis de longues années. On en ressort gentiment ébouriffé, mais ravi de s’être laissé embarquer ».

La vision panoramique qu’offre l’écoute des albums du catalogue Alea n’est pas à comprendre comme un bilan. C’est juste une passionnante mise au point. Le reste a pour nom avenir : pas d’inquiétude, Pierre de Bethmann saura le dessiner. On sait depuis les années 90 et le trio Prysm qu’il n’a jamais manqué ni d’énergie ni d’imagination. Vivement la suite !

par Denis Desassis // Publié le 9 juillet 2023
P.-S. :

[1En témoigne son récent album Travelling.

[2Avec Simon Tailleu à la contrebasse et Antoine Paganotti à la batterie.